Les « Trente Glorieuses » sont derrière nous depuis presque cinquante ans. Les années 1970 furent celles de la « crise », attribuée par nombre d’analystes au retour à une économie et à des relations monétaires internationales dérégularisées et instables et à la remise en cause du système de protection sociale élaboré en 1945. La période 1984-2017 a vu, en France, la consécration du libéralisme, y compris par la gauche socialiste, en même temps qu’une succession de réformes visant à sauver la Sécurité Sociale à coups de rabotages, de diminution des remboursements de prestations et de plans d’austérité. Ces dernières années ont vu la réforme du Code du Travail et celle des retraites, lourde de conséquences pour les futurs retraités nés après 1975. Ainsi disparaissent les derniers morceaux de cet État-providence que les dirigeants politiques affirment vouloir sauver. Cependant, la majorité de la population ne se résigne pas à cette triste évolution.
Le système de protection sociale est irrémédiablement déficitaire. On s’efforce de croire qu’avec la fin de la crise sanitaire et une bonne relance de l’économie, les problèmes du jour auront leur solution, et que non seulement la France regagnera le chemin de l’emploi mais aussi que le système de protection sociale retrouvera son équilibre.
La crise sanitaire a provoqué un creusement abyssal des déficits et une augmentation de la dette, en raison de la nécessité d’acheter le matériel médical dont on manquait, de l’augmentation des dépenses hospitalières et des indemnités journalières, et du fol « quoi qu’il en coûte ». Les chèques de l’État aux citoyens se multiplient : chèque carburant, chèque bois, chèque inflation etc. La résorption de la dette ne sera pas un long fleuve tranquille dont le cours paisible serait garanti par une quelconque croissance économique.
D’autant plus que le gouvernement s’est engagé à revaloriser les rémunérations des soignants, ce qui amènera une dépense de 8 milliards d’euros en année pleine. Il faut ajouter à cela l’annonce d’autres mesures comme l’allongement du congé de paternité, et on comprendra que la reprise économique ne suffira pas à combler les gouffres. Les remèdes classiques seront inefficaces, voire contre-productifs. De nouvelles diminutions de remboursements ou de nouvelles hausses de cotisations nuiraient à une politique de relance industrielle, indispensable à la redynamisation de l’économie.
Le pays semble plonger dans un profond déclin économique. Que faire ? Remettre à plat le système de protection sociale pour l’adapter à notre époque n’est pas facile, comme l’ont montré les débats et les grèves et manifestations provoquées par la réforme des retraites. Or, une refonte est indispensable ; sinon, sans que nul ne le souhaite, le système va se rétrécir et se dégrader jusqu’à ressembler à celui de la Grande-Bretagne où il n’est plus que la planche de salut des plus pauvres, ou des États-Unis où il est l’affaire des fonds de pension et autres organismes privés, avec tous les risques et inégalités en découlant, avec pour résultat une cinquantaine de millions de pauvres, et d’autres millions de demi-pauvres.
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