arts de la scène

Ariane Chemin n’est pas seulement l’une des plus réputées journalistes
du quotidien Le Monde. Elle n’est pas non plus réductible aux enquêtes
souvent passionnantes qu’elle publie sous formes de livres, même si son
nouvel ouvrage « Raoult, une folie Française » (Gallimard, 256 p. 18 €),
qu’elle a écrit en compagnie de Marie-France Etchegoin, mérite le
détour. Attentive à ses contemporains, soucieuse de ne pas se laisser
bercer par les sirènes de la notoriété, cette femme en éveil est aussi
protestante. Pour Fréquence Protestante, elle accepte d’évoquer les
sources familiales qui la constituent, sa façon d’appréhender, d’exercer
son métier, enfin d’expliquer pourquoi ce drôle de zèbre de Raoult
reflète une part de nos pathologies collectives. 

Linguiste et romancier, Jean-Paul Honoré publie des ouvrages où la
tendresse et la fraternité tiennent une place essentielle; mais plutôt
que de les exprimer de façon spectaculaire ou grandiloquente, Jean-Paul
Honoré choisit la pudeur et la subtilité. Son nouveau livre, « Un lieu
de justice » (Arléa, 187p, 18€) ne se contente pas de relater le
fonctionnement du nouveau Palais de justice de Paris. C’est un monde,
une société complexe qu’il nous décrit. Toujours avec le sourire, mais
avec une acuité qui nous invite à réfléchir. 

Agrégé de philosophie, journaliste, écrivain, Michel Field est un être
passionné, rieur et cultivé. Son nouveau livre, « Paris émois » (Mialet
Barrault, 237 p. 20 €) lui donne l’occasion d’évoquer les drames et les
joies qui traversent la ville-monde en perpétuel mouvement, changement
permanent. Les tableaux qu’il nous offre, instants d’intimité, drames
collectifs ou rencontres cocasses, reflètent le tempérament d’un homme
engagé dans la confrontation libre des idées mais viscéralement hostile
au sectarisme, un sentimental attentif. Michel Field, à Paris comme dans
la conversation radiophonique, est un promeneur solidaire. 

Alors que vient de paraître son livre, « Gloria Vynil » (éditions Zoé,
204 p.) Rose-Marie Pagnard explique de quelle manière la littérature est
venue à elle, analyse le rapport qu’elle entretient avec les mots, nous
parle aussi de son compagnonnage avec la peinture et la sculpture.
Extraordinaire créatrice de langage, Rose-Marie Pagnard invente des
phrases qui swinguent, qui suivent leur chemin, libres de tout
engagement, de toute pesanteur et qui cependant restent fidèles,
attentives à leurs lecteurs. Une rencontre comme une invite à la
lecture. 

Florence Quentin, depuis sa plus tendre enfance, a élu pour patrie de
recherche historique et de rêves l’Égypte ancienne. Elle est aujourd’hui
l’une des spécialistes les plus populaires de cette épopée formidable
qui ne cesse de passionner nos concitoyens. Son nouvel ouvrage, « Les
grandes souveraines d’Égypte » (Perrin, 416 p. 24 €) nous donnera
l’occasion de découvrir et de comprendre le parcours d’une française pas
comme les autres. Ou presque ? 

Que reste-t-il des utopies nées de Mai ? Professeur d’Histoire
contemporaine à l’Université de Reims, Philippe Buton propose une
analyse érudite et cependant divertissante de ce que l’on appelle le
gauchisme. Sans juger personne- étudiants, militants syndicaux,
policiers-, cet homme de science relate les débats, les confrontations
idéologiques et  les tendances qui ont secoué la France entre  1968 et
la fin des années 80. Son nouveau livre, « Histoire du gauchisme,
l’héritage de Mai 68 » (Perrin 560 p. 26 euros) compte parmi les
lectures les plus captivantes de ce printemps. 

Historienne et chercheur associé à l’Université Paris-Sorbonne, Juliette
Glikman a renouvelé la façon d’aborder le Second Empire, non pas en
prenant parti pour ou contre Napoléon III, mais en soulignant les
spécificités d’un régime plus complexe qu’on le croit souvent. Cette
femme de science rend hommage aux figures de la vulgarisation qui lui
ont fait découvrir les plaisirs de la narration. Juliette Glikman est 
une jeune femme très chaleureuse dont la mémoire familiale est marquée
par le courage et la fidélité à la France. 

Alain Borer, écrivain, poète, nous alerte sur la menace de disparition
qui pèse aujourd’hui sur notre langue. Sa nouvelle publication, « Speak
white ! » ( Gallimard, Tracts, 43 P ; 4,90 €) dénonce la mainmise d’un
anglais dégradé sur notre champ linguistique. Pour Alain Borer, une
telle évolution provoque une détérioration du rapport à la loi : quand
on n’a plus les mots pour exprimer ce que l’on ressent, ce que l’on
pense, on passe à l’acte et l’on quitte la civilisation pour entrer dans
la barbarie. 

Philosophe, psychanalyste et musicologue, Danielle Cohen-Levinas
explique la relation singulière qu’elle a tissée, dès l’enfance, avec la
musique et le monde de la pensée ; décryptant l’antisémitisme de Martin
Luther, l’approche de la « question juive » par Jean-Paul Sartre et la
critique qu’en formula Emmanuel Levinas, cette intellectuelle estime,
dans son livre « L’impardonnable » (Le Cerf 264 p. 22€) que le pardon
est possible à certaines conditions. 

Pour dresser le portrait de Jean-Claude Schmitt, on aurait le droit
d’écrire qu’il est archiviste de formation, paléographe et historien de
profession, directeur d’études à l’Ecole des Hautes études en sciences
sociales en titre. Mais on aime à le considérer comme l’un des plus
importants médiévistes de notre époque ; un explorateur étonnant des
âmes et des pratiques de jadis, qui nous paraissent mystérieuses au
point que l’on les pense primitives, archaïques, et dont il restitue les
mystères et la complexité. Par le choix des sujets, le regard qu’il
porte sur les êtres et sur les documents, Jean-Claude Schmitt est un
homme de science imprégné de sensibilité. Son nouveau livre, Le cloître
des ombres (Gallimard, 469 p. 29,50€) au titre magnifique, à l’audace
renouvelée sans cesse, en apporte la démonstration. 

Le pasteur Samuel Amedro, président de la région Ile-de-France de
l’Eglise protestante unie de France (EPUdF), évoque son enfance dans le
Nord, le milieu familial et social dans lequel il a grandi, sa vocation
précoce. Il explique aussi comment son métier d’infirmier, qu’il a
pratiqué de façon parallèle à ses études en théologie, lui a permis
d’appréhender son engagement pastoral. Dans la seconde partie de
l’émission, Samuel Amedro donne son point de vue sur l’évolution du
protestantisme Français, le dialogue interreligieux, le projet de loi
sur le séparatisme. Une rencontre qui reflète la personnalité
chaleureuse d’un pasteur attentif à la philosophie, à la richesse du
débat public, aux ressources de la nuance. 

Yves Azeroual est journaliste et documentariste. A l’occasion de la
sortie de son nouveau livre «Faubourg Montmartre », Le passeur 391 p.
21,50 €) histoire un peu romancée du gang des frères Zemmour, il nous
fait partager sa propre histoire, celle d’un enfant de la République,
jeune juif ayant grandi dans une climat de fraternité chaleureuse avec
des copains musulmans. Il s’insurge contre la résurgence de
l’antisémitisme et nous alerte contre le communautarisme. 

 Valérie Manns regarde le monde et nous en propose une radiographie  sensible. Elle est cinéaste, artiste du réel dans la mesure où,  préférant le documentaire à la fiction, cette femme d’exigence aborde  les grandes questions de toujours – la foi, la place des femmes ou bien  encore la liberté. Sans rien céder à l’émotion que peuvent provoquer les  images, Valérie Manns exprime sa singularité. Rigoureuse mais tendre,  elle exprime son refus des injustices ou le rejet des processus de  domination sans jamais verser dans le didactisme ou la démonstration  pesante. Au cours de cet entretien-portrait, Valérie Manns explique par  quels chemins particuliers le désir de réaliser des films est devenu  central chez elle. Enfin, elle nous dit ce qu’elle doit au  protestantisme, dont elle parle avec ferveur, un souci constant de  vérité, le sens de la fidélité. Une artiste formidable. 

 Pierre-Olivier Léchot présente la particularité d’être à la fois  théologien et historien. Son nouveau livre, « Luther et Mahomet » (Le  Cerf, 563 p. 29 €) permet de comprendre de quelle façon les Réformateurs  ont perçu l’Islam- évidemment par l’étude du Coran, on ne se refait  pas…- mais il analyse aussi les chemins du dialogue intellectuel très  constructif que Pierre Bayle et les protestants des XVIIème et XVIIIème  siècle ont arpenté. Bien entendu, le travail de Pierre-Olivier Léchot  nous invite à réfléchir aux rapports que nous pouvons aujourd’hui  entretenir avec l’Islam contemporain. 

 Le sociologue Jean-Pierre Le Goff propose une analyse grave, percutante  et cependant teintée d’humour au sujet de la France d’aujourd’hui: « La  société malade » (Stock, 215 p. 18,50€). Au cours de l’émission,  Jean-Pierre Le Goff évoque son enfance, le milieu dans lequel il a  grandi, son parcours intellectuel. Puis il souligne que le caractère  idéologique de l’ultralibéralisme tel qu’il sévit depuis quarante ans.  Lui-même ayant été atteint par la Covid, il rend hommage au personnel  soignant, défend les valeurs de solidarité, de fraternité, considérant  que l’intérêt général est désormais mieux pris en compte, la pandémie  provoquant peut-être le sursaut tant attendu. 

 L’éditeur Pierre Nora, de fil en aiguille, se confirme un écrivain de  premier plan. Son nouveau livre, « Une jeunesse » (Gallimard, 235 p. 18  €), se révèle beaucoup plus et beaucoup mieux que de simples souvenirs.  Ouvrage littéraire au ton limpide et sobre, il nous fait ressentir ce  qu’était une famille de Français juifs, depuis les années trente  jusqu’au lendemain de la Seconde guerre mondiale- ses valeurs et ses  traits de caractères son sens du devoir et sa fidélité- nous offre une  série de portraits tous plus émouvants, romanesques et puissants les uns  que les autres. Au cours de cette émission, Pierre Nora rend hommage à  ses parents, à quelques uns de ses amis, aux femmes qui l’ont marqué.  Tendre et rigoureux, cet homme d’âge, animé d’un formidable appétit de  vie, nous fait partager sa jeunesse d’aujourd’hui. 

 Homme de science et de foi, Jean-Paul Willaime est directeur d’études  émérite à l’École Pratique des Hautes Études en Sciences Sociales et  protestant. Quelques semaines après la parution de son ouvrage « La  religion dans la France contemporaine » qu’il a rédigé en compagnie de  Philippe Portier (Armand Colin, 317 p. 29 €), cet homme des frontières,  ainsi que ce natif de Charleville aime à se définir, évoque son histoire  familiale, son engagement spirituel et son parcours académique. Attaché  aux valeurs humanistes qu’il a reçues de ses parents mais aussi  cultivées dans sa vie personnelle et professionnelle, Jean-Paul Willaime  incarne un rapport au monde à la fois lucide et optimiste. 

 Philosophe et docteure en lettres, Marie-Paule Raffaelli-Pasquini  présente une étude extrêmement originale intitulée « Napoléon et Jésus,  l’avènement d’un messie » ( Le Cerf 262 p. 20 €). L’occasion de  réfléchir à la façon dont l’empereur a pu concevoir son propre destin,  la manière dont la propagande a fonctionné sous son règne, mais encore  de comprendre l’engouement que la figure christique du prisonnier de  Sainte-Hélène a suscité. Marie-Paule Raffaelli-Pasquini nous présente  son ouvrage avec beaucoup de bonne humeur, avec esprit critique aussi.  Précise, elle explique sa démarche, qui n’est pas celle de la  comparaison mais de l’analogie. C’est une femme passionnante qui porte  un regard aigu sur notre Histoire. 

 Bruno Le Maire accueille Fréquence Protestante à l’occasion de la  parution de « L’ange et la bête »  (Gallimard, 350 p. 20€ ).  Le ministre de l’Economie, des Finances et  de la Relance est aussi un ancien normalien, passionné de musique et de  littérature. On se souvient de son éloge du chef d’orchestre Carlos  Kleiber, « Musique absolue », d’un hommage intimiste et bouleversant :  « Paul. Une amitié » . Même ses ouvrages plus politiques, au premier  rang desquels on aime à citer « Jours de pouvoir », méditation sur sa  première expérience gouvernementale, sous la présidence de Nicolas  Sarkozy, révèlent une personnalité singulière, celle d’un homme d’action  qui ne perd jamais la justesse d’un trait, d’un détail, attitudes ou  regards qui traduisent le tempérament de ses contemporains. Plongé dans  le chaudron de l’économie mondiale, Bruno Le Maire agit pour notre pays  sans perdre son acuité d’entomologiste. Il évoquera pour nous le temps  politique, la façon de vivre l’exercice du pouvoir et la relation très  forte qu’il entretient avec la culture. 

 Qu’est-ce qu’un écrivain ? Pa seulement quelqu’un qui écrit. C’est un  explorateur, un voyageur, un être qui parcourt les paysages intérieurs  de son imaginaire ou les territoires qui, sur notre bonne vieille  planète, inspirent ses divagations de phrases et de mots. Claude Arnaud  publie Le mal des ruines ( Grasset, 125 p. 15 €), récit qui décrit le  lien très fort qui l’attache à la Corse, la terre d’une partie de ses  ancêtres. Mais plus qu’un livre classique de remémoration, Claude Arnaud  construit de page en page une réflexion sur la mort et la vie. Libre et  courageux, dégageant les lignes de forces de son propre destin,  l’écrivain révèle beaucoup de lui-même au cours de cet entretien.