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    fanny cohen moreau

    Explore "fanny cohen moreau" with insightful episodes like "Épisode 21 – Félix et la police à Caen pendant la Révolution", "Fin de la saison 1 de Kingdom", "Épisode 20 – Philippine et la puberté au siècle des Lumières (Passion Modernistes)", "On spoile Kingdom pt 1" and "Ils ont des chapeaux ronds vive Joseon" from podcasts like ""Passion Modernistes", "Geon Bae", "Passion Modernistes", "Geon Bae" and "Geon Bae"" and more!

    Episodes (33)

    Fin de la saison 1 de Kingdom

    Fin de la saison 1 de Kingdom

    Et voici la fin de la saison 1 de Kingdom ! Ce qui vous laisse une semaine pour regarder la saison 2... 

    Pour découvrir plus nos invités, c'est par ici: 

    Fanny, qui a du s'absenter en cours de route mais que l'on retrouvera dans le prochain épisode ! 

    Lolly qui sait raconter de belles (ou moins belles et qui font peur) histoires bien mieux que je ne raconte mon spoiler ! 

    Allez, bonne écoute à vous sur Podcut, n'hésitez pas à aller écouter les podcasts de nos invitées ! Et si vous voulez encourager Geonbae, on a un patreon joli chez Podcut, voili ! 

    Épisode 20 – Philippine et la puberté au siècle des Lumières (Passion Modernistes)

    Épisode 20 – Philippine et la puberté au siècle des Lumières (Passion Modernistes)

    Comment était conçue la puberté à l’époque moderne, que ce soit du point de vue médical ou social ?

    Passion Modernistes

    Portrait Philippine Valois au micro de Passion Modernistes
    Portrait Philippine Valois au micro de Passion Modernistes

    Philippine Valois travaille sur l’histoire médicale de la puberté au siècle des Lumières (XVIIIème siècle) dans sa thèse dirigée par Didier Boisson et co-encadrée par Nahema Hanafi au sein du Laboratoire TEMOS Angers. Dans cet épisode, elle raconte ce qui l’a motivé à travailler sur ce sujet et nous explique l’histoire de ce concept si particulier, du point de vue médical et social.

    Dans sa thèse, Philippine Valois veut comprendre comment les phénomènes physiologiques et biologiques de la puberté ont été compris par les médecins du XVIIIème, quels termes ils utilisent et quels imaginaires ils convoquent. Elle s’interroge aussi sur les incidences des représentations médicales, les maladies spécifiques, sur le quotidien des personnes pubères à cette époque ou encore les représentations sociales.

    Une définition compliquée de la puberté

    Annexe : Louis Binet (1744-1800), Les six âges de la fille. 1er âge, 1780-1782, Paris, Duchesne, taille douce, format inconnu. Bibliothèque nationale de France [en ligne]. https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b22001458/f73.item.r=Quatre%20%C3%A2ges%20de%20la%20vie
    Annexe : Louis Binet (1744-1800), Les six âges de la fille. 1er âge, 1780-1782, Paris, Duchesne, taille douce, format inconnu. Bibliothèque nationale de France [en ligne].
    Le concept de puberté est en plein de construction à l’époque des Lumières. A noter que le concept d’adolescence tel que nous le concevons aujourd’hui ne naît qu’au XIXème siècle. Il y a une forte ambiguïté des auteurs sur les mots entre puberté, adolescence et nubilité, parfois utilisés comme synonymes ou contraires. Philippine Valois montre qu’en général pour les médecins du XVIIIème siècle, l’adolescence désigne une période de la vie et la puberté les phénomènes biologiques, même si pas toujours, avec des différences selon le sexe.

    En général, la puberté est définie comme une crise à la fois positive et négative. La transformation pubertaire est sensée soigner certains maux de l’enfance comme l’épilepsie, l’échauffement créé par la puberté pouvant, toujours selon les médecins du XVIIIème siècle, guérir certaines maladies. Mais c’est aussi une crise négative avec son lot de nouvelles maladies, car la puberté « trouble l’âme et le corps« , on commence à dire que l’adolescent éprouve du mal-être. Les médecins utilisent des termes parfois poétiques, comme « orage« , « tempête » ou même « révolution« , parce que l’on passe d’un enfant asexué à un être sexué.

    Le contexte des Lumières

    Toute cette vision de la puberté s’inscrit dans le mouvement des Lumières, un mouvement à la fois culturel et philosophique, une période où l’éducation des enfants devient un sujet prioritaire. L’Émile de Rousseau est notamment une référence pour les médecins de l’époque, dont le chapitre 4 est consacré à l’adolescence. C’est aussi un contexte de « dégénérescence de l’espèce humaine« , formulée entre autres par Buffon en 1766 : pour lui, on pourrait expliquer toutes les variations entre les individus par une dégénération d’une espèce originelle. Une vision bien sûr profondément raciste, et les médecins ont dans ce sens un discours alarmant sur les problèmes démographiques et la faiblesses des enfants.

    Et à la fin du XVIIIème siècle, les débuts du mouvement hygiéniste dénoncent le mode de vie oisif des élites socio-culturelles. Il est par exemple constaté que les jeunes filles qui vivent dans ces milieux fastes étaient réglées plus précocement ou ont des problèmes de menstruations.

    Et dans le reste de l’épisode…

    Dans le reste de l’épisode, on parle notamment des différences entre les hommes et les femmes, de la vision de la masturbation, des maladies propres à la puberté, du contrôle des corps adolescents par les médecins et la société, et de comment Philippine Valois travaille sur ses sources pour sa thèse.

     

    Nicolas Lancret, L’Adolescence, 1707-1708, Paris, N. De Larmessin, estampe. Bibliothèque Nationale de France. [en ligne]. https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b84087496.r=adolescence?rk=85837;2
    Nicolas Lancret, L’Adolescence, 1707-1708, Paris, N. De Larmessin, estampe. Bibliothèque Nationale de France. [en ligne].

    Pour en savoir plus sur le sujet de l’épisode, on vous conseille de lire :

    • Michel Bernos, Yvonne Knibiehler, Elisabeth Ravoux-Rallo et Eliane Richard, De la pucelle à la minette : les jeunes filles, de l’âge classique à nos jours, Paris, Temps actuels, 1983
    • Scarlett Beauvalet-Boutouyrie et Emmanuelle Berthiaud, Le rose et le bleu, Paris, Belin, 2016
    •  Patrice Huerre, Martine Pagan-Reymond et Jean-Michel Reymond, L’adolescence n’existe pas, Paris, O. Jacob, 1997
    •  Thomas Laqueur, Le sexe en solitaire, Paris, Gallimard, 2005
    • Agnès Thiercé, Histoire de l’adolescence, Paris, Belin, 1999.
    • Juan Jiménez-Salcedo, « L’hygiénisme au XVIIIe siècle et l’éducation des jeunes filles », in Bernard Bodinier, Martine Gest, Paul Pasteur et Marie-Françoise Lemmonier-Delpy (dir.), Genre & Éducation : Former, se former, être formée au féminin, Mont-Saint-Aignan, Presses universitaires de Rouen et du Havre, coll. « Éducation », 2018, pp. 141-152.
    • Karen Harvey, « Le Siècle du sexe ? Genre, corps et sexualité au dix-huitième siècle (vers 1650-vers 1850) », Clio. Femmes, Genre, Histoire, 2010, no 31, pp. 207-238.
    • Gabrielle HOUBRE, Le corps des jeunes filles de l’Antiquité à nos jours, edi8, 2010, 189 p.

    Dans cet épisode vous avez pu entendre les extraits des œuvres suivantes :

    Si cet épisode vous a intéressé vous pouvez aussi écouter :

    Ce très beau générique a été réalisé par Julien Baldacchino (des podcasts Stockholm Sardou, Radio Michel, Bulle d’art…) et par Clément Nouguier (du podcast Au Sommaire Ce Soir).

    On spoile Kingdom pt 1

    On spoile Kingdom pt 1

    Ils ont les chapeaux ronds, vive Joseon ! Après avoir parlé un peu de ce qu'il se passait en Corée dans les années 1500-1600, on a décidé de vous spoiler ce qui se passait dans le drama Kingdom. Aujourd'hui un premier segment d'un total de trois parties (l'épisode est un peu plus long que prévu initialement), pour faire durer le plaisir... 

    On garde la fine équipe de Fanny et Lolly

    Bonne écoute à vous sur Podcut, n'hésitez pas à aller écouter les podcasts de nos invitées ! Et si vous voulez encourager Geonbae, on a un patreon joli chez Podcut, voili ! 

    Ils ont des chapeaux ronds vive Joseon

    Ils ont des chapeaux ronds vive Joseon

    Cette semaine on voyage à l'époque Joseon avec Fanny, Lolly et Jo ! Premier épisode pour parler d'un drama qui a fait vibrer les fans de dramas, de Corée, de zombies et puis de jolis chapeaux ! Kingdom est sorti en 2019, et il en ressort quoi ? Avant de parler du drama, on a décidé de parler un peu du contexte historique, du dresscode Joseon et d'autres choses ! 

    Bonne écoute sur Podcut ~ 

    Vous pouvez retrouver Fanny et ses podcasts Passion Médiéviste, Passion Moderniste, Passion Antiquités, ses Super Joutes Royales juste ici ! Quant à son podcast Multimorphoses, il se trouve par ici ! 

    Quant à Lolly, elle nous raconte de belles histoires sur son site Lendewell

    Enfin Jo, que l'on ne présente plus, le binôme sûr de Geonbae, poste ses photos de voyage et du quotidien juste là. 

    On se retrouve la semaine prochaine pour la suite ! Et un full spoiler du drama... Soyez prêts ! En attendant, n'hésitez pas à soutenir Podcut juste ici sur notre patreon : https://www.patreon.com/podcut?l=fr ♥ 

    Montage par Manu de Tartine ta culture 

    Épisode 19 – Laura et les malades dans la peinture néerlandaise du XVIIème siècle (Passion Modernistes)

    Épisode 19 – Laura et les malades dans la peinture néerlandaise du XVIIème siècle (Passion Modernistes)

    Comment les malades étaient représentés dans la peinture néerlandaise du XVIIème siècle ?

    Passion Modernistes

    Portrait Laura Pennanec'h
    Portrait Laura Pennanec’h

    Dans cet épisode Laura Pennanec’h vous parle de représentations des maladies, de la peinture néerlandaise du XVIIème siècle et de l’histoire du genre. Depuis 2017 elle prépare une thèse sur le sujet « Réseaux de savoirs genrés autour du corps malade dans la peinture hollandaise du XVIIe siècle » au Centre Alexandre-Koyré (EHESS), sous la direction de Christian Jacob et Rafael Mandressi.

    A partir d’une centaines de tableaux, elle étudie comment des peintres nés ou formés à Leyde qui a vu se développer une école de peintres, « les peintres précieux« , qui ont beaucoup représentés les malades et les médecins. Parmi ses peintres, elle étudie notamment Gérar Dou, Frans van Mieris l’Ancien et Jan Steen.

    Une représentation genrée de la maladie

    Gerard Dou (Leyde, 1613 – Leyde, 1675), La femme hydropique, (De waterzuchtige vrouw), 1663, huile sur panneau de bois, (86 cm x 68 cm), Paris, Musée du Louvre.
    Gerard Dou (Leyde, 1613 – Leyde, 1675), La femme hydropique, (De waterzuchtige vrouw), 1663, huile sur panneau de bois, (86 cm x 68 cm), Paris, Musée du Louvre.

    La thèse de Laura Pennanec’h entend mettre en lumière les réseaux de savoirs genrés enserrant les corps malades tels qu’ils furent dépeints dans la Hollande du XVIIe siècle. Cela permet d’établir d’abord une histoire des corps malades tels qu’ils ont été peints à l’époque en prenant pour entrée les variations iconographiques produites par le sexe des malades représentés.

    Il s’agit également de faire une histoire de l’insertion des tableaux dans un territoire donné, une histoire des circulations des motifs et des thèmes iconographiques entre les images et entre les peintres afin d’étudier ce que ces circulations disent de la culture visuelle des artistes, de leurs relations personnelles, de leurs sociabilités.

    Comparer avec l’histoire des sciences

    Parallèlement, l’utilisation d’un corpus textuel (médical comme artistique) permet de resituer les tableaux par rapport aux discours écrits sur la maladie, sur les relations entre hommes et femmes, sur les modalités de figuration des corps. Si elles ne sont pas prises pour centre, les intentions des acteurs — peintres, médecins — sont néanmoins intégrées dans un raisonnement qui souligne l’importance du cadre personnel, social et intellectuel dans lequel ils évoluaient, donnant à voir, d’une certaine manière, une sociologie rétrospective de ce qui existait à l’époque.

    En ce sens, Laura multiplie les échelles d’analyse, en se concentrant tour à tour sur les lieux (faculté de médecine, maison particulière, atelier de peintre), les individus (peintres, médecins, chirurgiens, malades), les objets et les pratiques (visite médicale, saignée, pose de ventouses, observation des urines).

    Pour en savoir plus sur le sujet de l’épisode, Laura vous conseille de lire :

    Frans van Mieris l'Ancien (Leyde, 1635 – Leyde, 1681), La visite du médecin ou La malade d’amour (Het bezoek van de arts of De zieke vrouw), 1657, huile sur cuivre, (34 cm x 27 cm), Vienne, Kunsthistorisches Museum.
    Frans van Mieris l’Ancien (Leyde, 1635 – Leyde, 1681), La visite du médecin ou La malade d’amour (Het bezoek van de arts of De zieke vrouw), 1657, huile sur cuivre, (34 cm x 27 cm), Vienne, Kunsthistorisches Museum.

    Sur la peinture néerlandaise du xviie siècle :Une synthèse dense mais efficace :

    • Haak, Bob. The Golden Age: Dutch Painters of the Seventeenth Century. Londres: Thames and Hudson, 1984.

    Une référence plus récente qui permet de repenser la notion de « siècle d’or » :

    • Blanc, Jan. Le siècle d’or hollandais : une révolte culturelle au XVIIe siècle. Paris, France: Citadelles & Mazenod, 2019.

    Sur la médecine et les savoirs sur le corps au xviie siècle :

    Un manuel à destination d’étudiants en histoire de la médecine (et avec une visite du médecin de Jacob Toorenvliet, peinte en 1666, en première de couverture !) :

    • Elmer, Peter, éd. The Healing Arts: Health, Disease and Society in Europe, 1500-1800. Manchester: Manchester University Press, 2004.

    Un ouvrage sur la circulation des savoirs dans les Provinces-Unies :

    • Cook, Harold J. Matters of Exchange: Commerce, Medicine, and Science in the Dutch Golden Age. New Haven: Yale University Press, 2007.
    2.Le frontispice de la Genees-Oeffening de Paul Barbette, graveur anonyme, vers 1670.
    Le frontispice de la Genees-Oeffening de Paul Barbette, graveur anonyme, vers 1670.

    Sur les femmes dans la peinture néerlandaise du xviie siècle :

    Un ouvrage synthétique :

    • Franits, Wayne E. Paragons of Virtue: Women and Domesticity in Seventeenth-Century Dutch Art. Cambridge: Cambridge University Press, 1993.

    LE texte de référence sur les représentations de femmes malades :

    • Dixon, Laurinda S. Perilous Chastity: Women and Illness in pre-Enlightenment Art and Medicine. Ithaca: Cornell University Press, 1995.

     

    Dans cet épisode vous avez pu entendre les extraits des œuvres suivantes :

    Si cet épisode vous a intéressé vous pouvez aussi écouter :

    Ce très beau générique a été réalisé par Julien Baldacchino (des podcasts Stockholm Sardou, Radio Michel, Bulle d’art…) et par Clément Nouguier (du podcast Au Sommaire Ce Soir).

    Épisode 18 – Olivier et la marine au XVIIIème siècle (Passion Modernistes)

    Épisode 18 – Olivier et la marine au XVIIIème siècle (Passion Modernistes)

    Que sait-on sur la marine du XVIIIème siècle, au moment où elle passe de royale à républicaine ?

    Passion Modernistes

    Olivier Aranda au micro de Passion Modernistes
    Olivier Aranda au micro de Passion Modernistes

    Dans ce nouvel épisode de Passion Modernistes nous allons faire un voyage dans le temps et parler de la fin de l’époque moderne, et plus précisément du contexte de la révolution française, mais nous allons nous éloigner de Paris et mettre cap à l’ouest, sur Brest et l’Atlantique. Depuis octobre 2018, Olivier Aranda prépare une thèse d’histoire moderne sur « La marine de la République à Brest et dans l’Atlantique 1792-1803« , sous la direction de Pierre Serna, à l’université Paris 1 Panthéon Sorbonne, en partenariat avec l’Institut d’histoire moderne et contemporaine de Paris.

    A la fin du XVIIIème siècle, la société est « maritimisée », marquée par la mer et les échanges commerciaux, notamment avec le café. En France, la Révolution vient marquer la fin du siècle, et à partir de 1789 a lieu des bouleversements politiques et géopolitiques qui vont impacter la sphère maritime.

    Dans sa thèse, Olivier Aranda veut montrer que cette sphère navale continue d’être fondamentale après la Révolution et la fondation de la République en 1792, que les échanges et affrontements se poursuivent, par exemple dans l’espace antillais sur les plans stratégiques et économiques. Il souhaite étudier la stratégie navale de la France à cette époque, en réévaluant certaines sources, et pour contrer une grande part de l’historiographie qui a donné une mauvaise image de cette marine républicaine.

    L’organisation de la marine au XVIIIème siècle

     Banner - National Maritime Museum
    Banner – National Maritime Museum

    La flotte se divise en deux groupes : les navires de ligne (avec au moins 700 corps d’équipage), le cœur de la flotte qui combattent lors des batailles, et tous les bâtiments de plus petites tailles, qui ont plutôt des rôles de messagers, pour le commerce…

    Et à l’intérieur de ces navires, on trouve des officiers (un corps qui se renouvelle énormément à la période révolutionnaire) , les officiers mariniers (les spécialistes), et l’équipage avec les matelots. Sans oublier à terre le personnel administratif dans les ports et à Paris.

    C’est l’époque de l’âge d’or de la marine en bois, le modèle des vaisseaux de 74 canons est standardisé, la France construit tous ces navires sur ce modèle. L’évolution se fera du côté des armes, dans le contexte du conflit avec l’Angleterre, avec notamment les débuts de l’utilisation des obus explosifs (mais seulement mis au point en 1821).

    On voit que la marine n’est pas du tout délaissée par les autorités révolutionnaires, mais qu’au contraire on voit des efforts dans le but d’acquérir une maîtrise de la mer par la France.

    Plan de la ville de Brest : Par Mr P. L. Bermont Ingénieur
    Plan de la ville de Brest : Par Mr P. L. Bermont Ingénieur

    La marine à Brest

    Durant tout le XVIIIème siècle la marine est très importante à Brest. Et à l’époque révolutionnaire, Brest est un îlot républicain dans un zone plutôt hostile à la République, avec par exemple les Chouans. La ville a pu résister grâce à son organisation géographique spécifique, avec un arsenal e son coeur et une  muraille de Vauban qui la protège. Et en mer, la ville n’est accessible que par un goulet défendu par des batteries d’armes.

    Pour en savoir plus sur le sujet de l’épisode, on vous conseille de lire et consulter :

    Dans cet épisode vous avez pu entendre les extraits des œuvres suivantes :

    Si cet épisode vous a intéressé vous pouvez aussi écouter :

    Épisode 17 – Sabrina et les voyages d’Antoine Galland

    Épisode 17 – Sabrina et les voyages d’Antoine Galland

    Écrivain, traducteur, voyageur, diplomate… Embarquez avec Antoine Galland dans cet épisode !

    Passion Modernistes

    Portrait Sabrina Vincent
    Portrait Sabrina Vincent

    Dans cet épisode de Passion Modernistes, Sabrina Vincent vous parle d’Antoine Galland et de ses voyages. Elle a étudié cette personnalité au cours de son mémoire soutenu en 2018 à l’université de Reims Champagne Ardennes, sous la direction d’Aurélien Girard et Mathieu Grenet.

    La France et la Méditerranée à la fin du XVIIème siècle

    Dans cet épisode nous sommes à l’époque du règne de Louis XIV (1643-1715). Antoine Galland ne connaitra rien d’autre, puisqu’il naît en 1646 et décède en 1715. Après 1650 la France est de plus en plus présente en Méditerranée. La multiplication des travaux dans le domaine naval et portuaire démontre une volonté de se tourner vers l’espace méditerranéen. On est ici dans la politique mercantiliste de Jean Baptiste Colbert qui souhaite favoriser les exportations et faire affluer les métaux précieux dans le royaume de France.

    Colbert fonde d’abord la Compagnie des Indes en 1664 et la Compagnie du Levant en 1670 qui vise à organiser les relations commerciales entre les ports français (Marseille, Sète) avec les ports de l’Empire ottoman. C’est dans ce contexte que Jean-Baptiste Colbert fonde, sous tutelle du gouvernement, une grande Compagnie qui reçoit le nom de « Compagnie du Levant ».

    Antoine Galland, un érudit français intéressé par l’Orient

    Antoine Galland naît le 6 avril 1646 à Rollot (Somme) et meurt le 17 février 1715 à Paris. Il est surtout connu sous la postérité comme étant le traducteur des Mille et Une Nuits, véritable best-seller du début du XVIIIème siècle même si pour lui c’est le fait le moins illustre de sa carrière. Il écrira d’ailleurs :

    Ce qu’il y a, c’est que cet ouvrage de fariboles (les Mille et Une Nuist) me fait plus d’honneur dans le monde que ne le ferait le plus bel ouvrage que je pourrais composer sur les médailles, avec des remarques pleines d’érudition sur les antiquités grecques et romaines. Tel est le monde : on a plus de penchant pour ce qui divertit que pour ce qui demande de l’application, si peu que ce puisse être.

    Sabrina Vincent pense qu’Antoine Galland aurait préféré qu’on le présente comme un orientaliste. Même si en réalité il est anachronique d’utiliser le terme d’orientaliste qui apparait au XIXème siècle, Aurélien Girard utilise d’ailleurs le terme de « professionnels » de l’Orient, et l’explique par le fait que ces érudits puisqu’ils maitrisaient les langues orientales avaient par conséquent, une capacité et une légitimité à étudier l’Orient.

    C’est aussi l’antiquaire du Roi, membre de la récente Académie Française puis professeur de langues arabes du Collège royal. On peut dire qu’avec un chemin de vie plutôt atypique et par sa grandeur intellectuelle, Antoine Galland a su se hisser au plus haut rang du monde érudit français au tournant du XVIIème et XVIIIème siècle.

    Carte du troisième voyage d'Antoine Galland, réalisée par Sabrina Vincent
    Carte du troisième voyage d’Antoine Galland, réalisée par Sabrina Vincent

    Des voyages en Levant

    Sabrina Vincent vous raconte dans cet épisode les différents voyages d’Antoine Galland, et notamment son troisième voyage fait en Levant aulequel elle a consacré ses recherches à partir d’un manuscrit particulier. Dans son premier voyage, Antoine Galland se rend à Constantinople en 1670 et voyage jusqu’en 1675, en Thrace, en Macédoine, en Roumélie orientale, en Asie mineure, dans les îles Égéennes, en Ionie, en Syrie et en Palestine. Puis il fait son deuxième voyage à Smyrne sur une très courte période sur l’année 1678.

    Son troisième et dernier voyage fait en Levant débute le 11 septembre 1679 à Toulon dans la suite du nouvel ambassadeur de la Porte, Gabriel de Guilleragues. Le 23 octobre 1679, Antoine Galland arrive à Milos et quitte le convoi de l’ambassadeur qui part vers Constantinople. D’octobre 1679 à octobre 1680, il essaye de rejoindre Constantinople le plus rapidement possible à ses propres frais. Néanmoins, les conditions météorologiques difficiles et les risques liés à la Course rallongent considérablement son voyage.  Le 18 octobre 1680, il arrive enfin à Constantinople et apprend que la compagnie du Levant est dissoute. Cependant, Guilleragues garde Galland auprès de lui. La troisième lettre se termine le 1er novembre 1680 mais la mission se poursuit.

    De 1680 à 1685, il séjourne à Constantinople. Il recherche des manuscrits et des médailles, et donne des leçons de grec à Mademoiselle de Guilleragues. Elle deviendra plus tard la marquise d’O à qui Galland dédiera les Mille et une Nuits. Gabriel de Guilleragues décède le 4 mars 1685 et le 1er septembre 1685, Antoine Galland est nommé antiquaire du Roi et chargé de continuer ses recherches de médailles en Orient pour le cabinet du Roi. De 1686 à 1688, il débute un voyage dans les îles de l’Archipel, séjourne de nouveau à Smyrne, fait une courte visite à Alexandrie et Rosette. Puis il retourne à Smyrne où il survit de peu au tremblement de terre du 8 juillet 1688. Suite à cela, il perd tous ses biens et ses relations de voyage et décide de rentrer en France en décembre 1688, clôturant ainsi près de dix-huit années d’aventures.

    Pour en savoir plus sur Antoine Galland et ses voyages, on vous conseille de lire :

    Feuillet de manuscrit de la main d'Antoine Galland
    Feuillet de manuscrit de la main d’Antoine Galland

    Sur Antoine Galland :

    • Antoine GALLAND, Le voyage à Smyrne, Paris, éd. Chandeigne, 2000.
    • Antoine GALLAND, Voyage à Constantinople, Paris, Maisonneuve et Larose, 2002.
    • ABDEL-HALIM Mohamed, Antoine Galland : sa vie et son œuvre, Paris, A.G. Nizet, 1964

    Sur l’ « orientalisme » :

    • GIRARD Aurélien, Connaître l’Orient en Europe au XVIIe siècle, dossier thématique de XVIIe siècle, 2015
    • HEYBERGER Bernard, « L’Orient et l’islam dans l’érudition européenne du XVIIème siècle », Dix- septième siècle , 2015/3 (n° 268), p. 495-508.

    Sur la Course méditerranéenne et le commerce des captifs:

    • KAISER Wolfgang, Le commerce des captifs : les intermédiaires dans l’échange et le rachat des prisonniers en Méditerranée, XVe-XVIIIe siècle, Paris, Collection de l’école française de Rome, 2008
      FONTENAY Michel, La Méditerranée entre la Croix et le Croissant. Navigation, commerce, course et piraterie (XVIe-XIXe siècle), Paris, Classiques Garnier, 2010

    Sur le commerce en Méditerranée :

    • PANZAC Daniel, La caravane maritime : marins européens et marchands ottomans en Méditerranée (1680-1830), CNRS Éditions, Paris, 2004

    Dans cet épisode vous avez pu entendre les extraits des œuvres suivantes :

    Si cet épisode vous a intéressé vous pouvez aussi écouter :

     

    Ce très beau générique a été réalisé par Julien Baldacchino (des podcasts Stockholm Sardou, Radio Michel, Bulle d’art…) et par Clément Nouguier (du podcast Au Sommaire Ce Soir).

    Épisode 16 – Benjamin et Mme Eloffe, marchande de mode (Passion Modernistes)

    Épisode 16 – Benjamin et Mme Eloffe, marchande de mode (Passion Modernistes)

    Comment devenait-on marchande de mode à la fin du XVIIIème siècle ?

    Passion Modernistes

    Benjamin Alvarez-Araujo
    Benjamin Alvarez-Araujo

    En juillet 2020, Benjamin Alvarez-Araujo a présenté un mémoire « Adélaïde Henriette Damoville, dite Mme Eloffe (1759-1805). Autour d’une marchande de modes imaginaire ». Il était sous la direction de Laurence Croq à l’ Université Paris.

    Née dans un contexte un peu pauvre, Adélaïde Henriette Damoville entre au service de Madame Pompey et se forme comme marchande de mode. Elle épouse M. Eloffe et ils finissent par récupérer la clientèle de Madame Pompey. Ils fournissent la cour de Versailles à la fin du XVIIIème siècle, la famille royale de l’époque et même Marie Antoinette. Pour connaître son activité il nous est parvenu deux de ses livres de comptes qui donnent des renseignements sur ce qui est vendu dans la boutique.

    Une signature de Madame Eloffe
    Une signature de Madame Eloffe

     

    Le métier marchande de mode

    Au XVIIIème siècle le travail de marchande de mode ne consiste pas à fabriquer des vêtements mais justement à être l’intermédiaire entre les fabricants et les clients, en inventant des modes vestimentaires. On les considère parfois comme les ancêtres des grands créateurs de mode mais ce n’est pas tout à fait vrai. Le métier de marchande de mode naît avec celui de mercier, les femmes qui l’exercent sont souvent des épouses de marchands merciers et elle s’occupent des articles de mode. Et à la fin du XVIIIème siècle elles s’autonomisent et créent leur propre corporation.

    Elles vendent les accessoires et les ornements, tout ce qui vient décorer un vêtement, avec de la dentelle, des broderies, des plumes, etc. Elles les assemblent sur des robes déjà faites pour former des ensembles, les ajoutant ou déplaçant. Elles sont surtout spécialisées dans les ornements luxueux, destinés à une clientèle aristocratique qui cherche à se distinguer par le vêtement.

    Et avec la Révolution, le fonctionnement des métiers change, les corporations sont supprimées en 1791, et désormais n’importe qui peut ouvrir boutique en payant une patente. A cette période la boutique des Eloffe évolue pour s’orienter plus vers la mercerie, s’adaptant au changement de leur clientèle.

    François Boucher, La Marchande de modes, 1746
    François Boucher, La Marchande de modes, 1746

    Pour en savoir plus sur le sujet de l’épisode, on vous conseille de lire :

    • Livre-journal dit de Mme Eloffe entièrement numérisé sur le site des Archives Nationales
    • BEAUREPAIRE Pierre-Yves, La France des Lumières. 1715-1789, Paris, Belin, « Histoire de France », 2014 [1re éd. : 2011].
    • GODINEAU Dominique, Les Femmes dans la France moderne (XVIe-XVIIIe siècles), Paris, Armand Colin, « U. Histoire », 2015.
    • ROCHE Daniel, La France des Lumières, Paris, Fayard, 1993.
    • ROCHE Daniel, La Culture des apparences. Une histoire du vêtement (XVIIe-XVIIIe siècles), Paris, Fayard, 1989.
    • SAPORI Michelle, Rose Bertin, ministre des modes de Marie-Antoinette, Paris, Éditions de l’Institut français de la mode, Éditions du Regard, 2003.
    • DA VINHA Mathieu, Dans la Garde-robe de Marie-Antoinette, Versailles, Château de Versailles, Paris, Réunion des Musées Nationaux, 2018.

    Dans cet épisode vous avez pu entendre les extraits des œuvres suivantes :

    Ce très beau générique a été réalisé par Julien Baldacchino (des podcasts Stockholm Sardou, Radio Michel, Bulle d’art…) et par Clément Nouguier (du podcast Au Sommaire Ce Soir).

    Épisode 15 – Isabelle et les médecins à Paris au XVIIIème siècle (Passion Modernistes)

    Épisode 15 – Isabelle et les médecins à Paris au XVIIIème siècle (Passion Modernistes)

    Que sait-on sur les médecins à Paris au XVIIIème siècle ?

    Passion Modernistes

    Isabelle Coquillard au micro de Passion Modernistes
    Isabelle Coquillard au micro de Passion Modernistes

    En 2018, Isabelle Coquillard a soutenu une thèse sur les médecins parisiens entre 1707 et 1789 à Paris, sous la direction de Laurence Croq (Université Paris Nanterre). Elle a voulu étudier un groupe professionnel sous « tous les angles » en mobilisant des sources institutionnelles (celles de la Faculté de médecine de Paris et des autres centres savants ) mais aussi notariales afin de saisir les docteurs dans leur vie professionnelle (marché de la santé et honoraires, clientèle, lieu de réception à domicile) et leur vie privée (habitat, mariage, fortune).

    Elle montre ainsi la pluralité d’activités des médecins au XVIIIème siècle (en ville, dans l’espace militaire, dans les campagnes, les ports et les colonies) et leur affirmation progressive en tant qu’experts de la médecine et acteurs à part entière de la politique sanitaire balbutiante du roi.

    En 1707, le roi Louis XIV décide de repenser l’enseignement médical en promulguant l’édit de Marly, et d’uniformiser la profession. Isabelle se sert de ce point de départ pour étudier les médecins parisiens tout au long du XVIIIème siècle, pour comprendre comment l’on devient médecin et comment ces hommes (et femmes) pratiquent dans leur quotidien.

    Liste de Messieurs les docteurs régents de la faculté de médecine en l'Université de Paris, avec leurs demeures, pour l’année 1770 (Wellcome Library, Londres)
    Liste de Messieurs les docteurs régents de la faculté de médecine en l’Université de Paris, avec leurs demeures, pour l’année 1770
    (Wellcome Library, Londres)

    Pour en savoir plus sur le sujet de l’épisode, on vous conseille de lire :

    erlan Hélène, Faire sa médecine au XVIIIe siècle. Recrutement et devenir professionnel des étudiants montpelliérains (1707-1789), Montpellier, Presses universitaires de la Méditerranée, 2013. Permet de comparer les Facultés de médecine de Paris et de Montpellier, les deux plus grandes institutions diplômantes au XVIIIe siècle. De nombreux docteurs régents parisiens ont éprouvé le cursus montpelliérain.
    Coquillard Isabelle, « Le marché des remèdes antivénériens et les docteurs régents de la faculté de médecine de Paris au xviiie siècle », in Rieder Philip, Zanetti François (éd.), Materia medica. Savoirs et usages des médicaments aux époques médiévales et modernes, Genève, Droz, 2018, pp. 161-188. Un chapitre pour aborder les questions de liberté professionnelle et de réputation des médecins, l’usage de son pouvoir coercitif par la Faculté.
    Lunel Alexandre, La Maison médicale du roi, XVIe-XVIIIe siècles. Le pouvoir royal et les professions de santé, Seyssel, Champ Vallon, 2008. Une mise au point précise sur l’histoire de la profession médicale et sur l’organisation des professions de médecin, de chirurgien, et d’apothicaire entre le XVIe siècle et la fin du XVIIIe siècle.
    Pauthier Céline, L’exercice illégal de la médecine (1673-1793) : entre défaut de droit et manière de soigner, Paris, Glyphe & Biotem, 2002. Une mise au point sur la façon dont la Faculté de médecine défend ses privilèges, une réflexion sur le champ d’intervention des médecins et sur les marges de la profession médicale.
    Perez Stanis, Histoire des médecins, Paris, Tempus, 2020. Une fresque allant de l’Antiquité à nos jours sur l’histoire à la fois sociale, politique et économique des médecins.
    Rieder Philippe, La figure du patient au XVIIIe siècle, Genève, Droz, Bibliothèque des Lumières, 2010. Pour découvrir ce qu’est un malade au XVIIIe siècle, la construction sociale de l’expérience de la maladie, et la culture médicale du professionnels de la médecine.
    Transcription de l’épisode 15 (cliquez pour dérouler)

    Fanny : Bonjour à toutes et à tous et bienvenue dans ce nouvel épisode de Passion Modernistes. Je m’appelle Fanny Cohen Moreau, et dans ce podcast, nous vous proposons de rencontrer de jeunes chercheurs et chercheuses en master ou en thèse qui étudient l’histoire moderne. Et pour rappel, l’histoire moderne c’est cette période qui s’est un petit peu glissée entre le Moyen ge et l’époque contemporaine, c’est-à-dire, en gros pour l’Europe occidentale, entre les années 1500 et 1800.

    Épisode 15, Isabelle et les médecins au XVIIIe siècle, c’est parti !

    Bonjour Isabelle Coquillard.

    Isabelle : Bonjour Fanny Cohen-Moreau, je suis ravie d’être là [rires].

    Fanny : Tu me donnes plein de pêche dès le début ! Isabelle, je te reçois parce que tu as soutenu une thèse en décembre 2018 sur le sujet Les médecins parisiens entre 1707 et 1789. Tu étais sous la direction de Laurence Croq à l’Université Paris Nanterre. Et oui, on avait déjà fait l’épisode 3 sur les sages-femmes, on avait déjà fait un épisode sur les épidémies, donc aujourd’hui, avec toi, on va parler de la médecine et surtout des médecins au XVIIIe siècle.
    Alors, déjà Isabelle, pourquoi tu as voulu travailler sur ce sujet ?

    Isabelle : Alors, c’est une longue histoire le choix de ce sujet, puisqu’au départ, j’étais intéressée par les femmes dans la résistance…

    Fanny : Ah oui, rien à voir !

    Isabelle : … Donc on est très très loin du sujet. Et puis, j’ai fait une maîtrise sur les salons parisiens au XVIIIe siècle, et je travaillais sur les Mémoires de Jean-François Marmontel, donc une source imprimée. J’ai découvert, moi, le XVIIIe siècle, j’étais vraiment très enthousiaste, j’étais très heureuse avec ce sujet, et – quelque part, malheureusement pour moi – Antoine Lilti a travaillé également sur le sujet en thèse, il a publié une magnifique étude aux éditions Fayard sur les salons parisiens, et arrivée en Master 1, je cherchais un sujet. Et je voulais travailler sur plutôt l’élite, et surtout travailler en histoire sociale.

    Donc mon directeur de l’époque, Monsieur Dumas, m’a posé différents thèmes, là aussi j’ai eu encore un truchement par les substituts du procureur général du Parlement de Paris.

    Fanny : Non, mais tu as fait combien de sujets, là ? [rires]

    Isabelle : Alors, celui-là, il n’a pas été mené à terme, mais il m’a permis de découvrir ce qui pour moi était l’archive mais avec un grand A, c’est-à-dire l’archive imprimée, la belle archive, donc les beaux volumes, là, de Joly de Fleury [NdT magistrat au Parlement de Paris]. Et j’avais une petite frustration avec ça parce que je travaillais donc sur mes mémoires imprimés, je les avais toujours sur moi, donc ça c’est extra, c’est le bonheur de l’historien, mais le contact même et cette recherche-là, je ne l’avais pas. Donc, avec les substituts du procureur général, je n’avais pas ce que Monsieur Dumas appelait l’enthousiasme pour son sujet, l’empathie pour son sujet. Alors, c’était super intéressant mais ça me parlait pas, je ne me voyais pas travailler là-dessus sur plusieurs années. Et les docteurs régents sont arrivés.

    Fanny : Ah. Voilà. Et pourquoi tu as voulu travaillé sur le XVIIIe siècle ? Est-ce que c’est une époque particulière ?

    Isabelle : C’est une époque qui fait résonance en moi. J’y suis arrivée par cette histoire culturelle et sociale, l’histoire des réseaux de sociabilité m’intéressait beaucoup, et l’arrivée aussi de la « bourgeoisie à talents ». La « bourgeoisie à talents » en fait, ce sont des personnes qui ont une certaine aisance sociale et qui arrivent à vivre de leur activité, qui n’est pas « dérogeante », c’est-à-dire qu’elle ne fait pas perdre la noblesse. Et on y trouve des groupes tels que les avocats, les notaires, et les médecins.

    Fanny : Pourquoi on les appelle « à talents » ?

    Isabelle : Parce qu’il y a une formation à la faculté, à Paris, il y a une structure, donc l’université, et au sein de cette université on a plusieurs facultés, dont la faculté notamment de médecine, et la faculté de droit, qui sont des facultés doctorales, donc on peut y enseigner, et elles délivrent surtout un diplôme qui permet d’exercer l’activité, donc véritablement de vivre de son talent.

    Fanny : Alors, pour qu’on se resitue un peu, est-ce que tu peux nous parler, en gros, du contexte historique au XVIIIe siècle, même si les auditeurs le connaissent parce que dans l’épisode précédent on en a un petit peu parlé aussi.

    Isabelle : Donc, en ce qui concerne mon sujet proprement dit, moi, je débute en 1707, parce que c’est la date de l’édit de Marly, qui correspond à une décision du roi de repenser l’enseignement médical. Quand je dis « l’enseignement médical », c’est un abus de langage. C’est plutôt d’uniformiser la profession, et c’est consécutif en fait à une réforme générale des études, donc ce qui me permettait de démarrer. Et puis, ce qui est intéressant dans cet édit, c’est que, à demi-mot quand même, le roi prend la faculté de médecine de Paris comme exemple, comme modèle.

    Fanny : C’est quel roi à l’époque ?

    Isabelle : Alors, en 1707 c’est Louis XIV, qui va mourir en 1715. Ce qui est intéressant aussi, c’est que cet édit a été pensé par un docteur régent, qui est Fagon. Fagon était aussi le premier médecin de Louis XIV. Donc il est évidemment favorable à la faculté qui lui a décerné le titre.

    Fanny : Et tu t’arrêtes en 1789, parce que bon…est-ce que c’est en lien avec la Révolution ? Ça a changé beaucoup de choses ?

    Isabelle : Alors, on a choisi comme date 1789 parce que c’est une date qui fait écho chez les lecteurs, parce que je pense aussi à un futur lectorat. Effectivement, il va y avoir une évolution, notamment en ce qui concerne la clientèle des docteurs régents, puisque le contexte politique – qui est celui de la Révolution française – fait que les nobles fuient Paris. Or, des clients extrêmement importants pour mes docteurs, ce sont ces nobles, qui sont capables de financer les services médicaux, qui coûtaient, pour une visite au domicile du médecin, j’ai estimé que c’était environ 2 livres 15, ce qui est une somme extrêmement importante. Et la date officielle de la fin de cette étude est plutôt 1792, qui est la suppression des corporations, c’est-à-dire des groupements professionnels, et la faculté de médecine est une corporation. D’où le jeu en fait dans le titre de mon travail, « corps et lumières », « corps » parce que corps du malade, mais aussi « corps » parce que corporation.

    Fanny : Et Isabelle, qu’est-ce que tu as montré dans ta thèse ?

    Isabelle : Alors c’est une thèse d’histoire sociale, donc l’idée c’est de comprendre comment on devient médecin, et ce qui m’intéressait aussi, c’est la pratique quotidienne de ces médecins. Donc j’ai toute une étude sur, justement, comment on exerce la médecine, quel est l’environnement du médecin, par exemple comment il va agencer sa demeure, pour recevoir à domicile. J’ai pu également montrer que les médecins immobilisent une pièce de cette demeure, et cette pièce, c’est ce que j’ai appelé le cabinet-bibliothèque. Donc cabinet, pour faire référence à l’accueil du client, et bibliothèque parce que l’un des instruments des médecins, c’est véritablement le livre qui leur permet d’avoir des recueils de cas, de retrouver par exemple des recettes de médicaments à prescrire.

    J’ai également retravaillé la question de la société royale de médecine, qui est créée en 1775, et l’historiographie classique présente cette société royale de médecine comme extrêmement novatrice, par rapport à une faculté jugée conservatrice. Or, mon travail montre que les têtes pensantes de cette société royale de médecine sont des docteurs régents. Donc on voit bien le passage de l’un à l’autre, et ils gardent la même doctrine médicale. C’est juste une façon de recueillir les cas, et un fonctionnement. La société royale de médecine est l’œuvre du Premier médecin du roi, donc Lassone, et les membres sont tout à fait soumis à Lassone. Au contraire, la faculté, modèle corporatif, on est plutôt dans le cadre d’une société des égaux, où chaque docteur peut s’exprimer, chaque docteur peut exercer les charges de la corporation.

    Fanny : Qu’est-ce qu’on a comme évolution dans la médecine au XVIIIe siècle ? Je le rappelle, j’ai fait un épisode sur les épidémies au XVIIIe siècle, mais qu’est-ce qu’on a comme changement par rapport au XVIIe siècle, notamment ?

    Isabelle : Les changements sont pas extraordinaires au XVIIIe siècle. On a plutôt cette doctrine médicale et une conception du corps qui va guider l’approche du médecin. Donc, au début du XVIIIe siècle, c’est un héritage du XVIIe, les médecins adhèrent à la doctrine iatromécaniste, c’est-à-dire que le corps est considéré comme une machine, et c’est ainsi qu’[il] fonctionne. Ensuite, à la mi-XVIIIe siècle, il y a un docteur régent, Théophile de Bordeu, qui va avoir une approche qui relève du vitalisme. Il y aurait un fluide vital dans notre corps, qui nous permet de fonctionner correctement et, à la fin, à la toute fin du XVIIIe siècle, on a l’avènement de la médecine clinique. Donc c’est plutôt, encore une fois, une évolution en termes de doctrine, d’approche du corps, qui va guider la façon dont les médecins vont le traiter et l’envisager.

    Les docteurs régents sont fidèles à la doctrine hippocratique, qui est la doctrine médicale officielle de la faculté de médecine de Paris, qui repose sur la théorie des quatre humeurs. Donc selon Hippocrate, les quatre humeurs sont le sang, la bile jaune, la bile noire et la lymphe, et un corps en bonne santé, c’est-à-dire un corps où nous avons un silence des organes, c’est ainsi qu’est définit l’état de bonne santé au XVIIIe siècle…

    Fanny : Silence des organes ? C’est là où on a pas mal ?

    Isabelle : Exactement. Et on peut remplir son rôle social, les bonnes apparences sont maintenues. [rires] Donc, l’idée c’est qu’il faut que toutes ces humeurs soient à égalité. Et cette conception est aussi influencée par le régime de vie des individus, donc la consommation alimentaire, l’activité physique.

    [extrait du film Ridicule]

    Fanny : On va s’intéresser maintenant, donc, aux médecins, c’est le sujet de ta thèse. Qui sont ces hommes de médecine que tu as étudiés ? Est-ce qu’ils formaient plutôt un groupe social homogène ou on avait des gens qui venaient d’un peu partout ?

    Isabelle : Alors c’est une très bonne question. Mon étude montre qu’on a un groupe extrêmement ouvert. J’ai toutes les situations. J’ai des cas de reproduction sociale, donc des enfants de docteurs régents qui deviennent docteurs régents.

    Fanny : D’ailleurs « docteur régent », pourquoi tu dis docteur régent et pas juste docteur ?

    Isabelle : En fait, le titre exact de ces médecins c’est « docteur régent de la faculté de médecine en l’université de Paris ».

    Fanny : Mmmh

    Isabelle : Parce que, déjà, pour exercer la médecine à Paris, il faut avoir une licence en médecine, qui est une autorisation professionnelle, qui permet d’exercer uniquement dans le ressort de la faculté qui l’a décernée, en l’occurrence Paris et ses faubourgs.

    Mon travail montre que tous les licenciés en médecine, à quelques rares exceptions, je pourrais y revenir par la suite, deviennent ensuite docteurs en médecine. Le doctorat permet au médecin de faire partie du corps de la faculté. Mais il y a des degrés. Le plus haut degré de membre de cette faculté, c’est régent. La régence donne le droit d’enseigner la médecine au sein de la faculté de Paris. Ce qui est une fonction prestigieuse, parce qu’elle va permettre aussi la reproduction du groupe, et la transmission, ce qui est très important, d’habitus de docteur régent, c’est-à-dire d’habitude de médecin, de savoir-être.

    Fanny : Et tu as étudié combien de personnes ?

    Isabelle : Alors j’ai 453 docteurs régents qui ont obtenu le titre et j’en ai une petite dizaine qui est dite « docteurs non régents », ils n’ont pas pu atteindre cette régence, alors pour diverses raisons. Soit parce qu’ils se sont présentés trop tard à l’examen. Certains ont été rayés du catalogue de régent, ce qui est une tache professionnelle importante, puisque le public est au courant qu’ils ont manqué en fait à cette doctrine médicale. Donc j’ai un exemple, qui est celui du docteur Guilbert de Préval, qui invente un remède qu’il appelle l’eau antivénérienne. Donc un remède prophylactique, ce qui est déjà un changement par rapport à la doctrine officielle de la faculté puisqu’il s’agit de prévenir une maladie. Là-dessus, la faculté est un peu réticente mais sans plus. Ce qui lui pose problème à la faculté, c’est que Guilbert de Préval va faire la publicité de son remède. Or, faire la publicité de son remède, c’est adopter le même comportement que d’autres individus que la faculté nomme les charlatans, les empiriques, les illégaux. Et en plus, Guilbert de Préval va avoir plus ou moins d’accointances avec une tenancière, qui n’est pas d’excellentes mœurs, donc ça gâche la réputation du groupe. Et la faculté intervient à ce titre-là. Donc là, elle est vraiment dans son rôle d’instance qui protège la corporation.

    Les docteurs régents doivent sans cesse respecter les règles de la corporation, et en même temps, ils ont une liberté professionnelle. Ils sont complètement libres de leur pratique, de leur choix de remèdes, à partir du moment où ça ne remet pas en cause les intérêts du groupe et cette corporation.

    Fanny : Mais est-ce qu’on a aussi des médecins qui viennent d’un milieu social qui n’a rien à voir, où vraiment c’est un peu le style des « self made men » qui viennent vraiment de la campagne, pour devenir médecin à Paris ?

    Isabelle : Alors, oui, on a ce genre de cas parce que le doctorat c’est le seul diplôme qui sanctionne une formation scientifique. Donc il y a des médecins, effectivement, qui viennent de milieu qui ne les prédestinent pas du tout à la médecine. Parce que, ce qui les intéresse, c’est plutôt d’avoir un diplôme qui sanctionne une formation scientifique. Et la faculté de médecine est la seule à délivrer ce type de diplôme. On peut penser, par exemple, au Jardin du Roi, qui est une institution parisienne, où il y a des cours de sciences, de médecine, de botanique, de chimie, mais le Jardin des Plantes ne délivre pas de diplôme. Et certains, d’ailleurs médecins, vont…alors ils pratiquent tous l’exercice privé de la médecine, ce qu’actuellement on appelle la pratique libérale, mais tous n’en vivent pas. On a aussi des rentiers qui vivent en fait de leurs rentes.

    Fanny : Qui juste ont passé ce diplôme comme ça, pour s’amuser ? En fait, ils n’exercent pas ?

    Isabelle : Non, ils n’exercent pas mais il y a en fait un véritable engouement pour la science.

    Fanny : A cette époque-là, les gens sont intéressés par ça.

    Isabelle : Tout à fait, on a un mouvement qui touche aussi le grand public. Il faut savoir que la particularité des docteurs régents c’est d’enseigner. Et certains se montrent être des professeurs extrêmement investis et développent cet aspect de leur carrière. Au XVIIIè siècle, lorsqu’on regarde la presse d’annonce, on trouve en fait des annonces de cours privés de professeurs. Donc ils enseignent chez eux, ce sont des cours payants, et ils peuvent développer de nouvelles approches également en termes de pédagogie. Donc plus de pratique, plus à l’écoute des élèves. Par exemple, Jussieu va faire des cours de botanique et il emmène ses élèves herboriser, c’est-à-dire rechercher des plantes dans les environs de Paris, et il leur explique comment faire, il leur apprend à reconnaître les plantes à diverses époques, puisque, évidemment, la forme végétale va varier selon la saison.

    Fanny : Est-ce qu’on a des femmes parmi tous ces médecins régents ?

    Isabelle : Alors, il n’y a pas de femme médecin au XVIIIè siècle. En fait, la première femme médecin en France, elle est diplômée à la fin du XIXè siècle. En revanche, les femmes ont un rôle dans la carrière de leur époux. C’est-à-dire que quand on étudie les contrats de mariage des docteurs régents, on se rend compte que la dot de la femme est extrêmement importante parce qu’elle va permettre de financer les études médicales qui avaient un coût extrêmement important, qui est chiffré à environ 5 000 livres, ce qui est conséquent. Et toute la dot de l’épouse peut être investie pour financer, justement, l’accès à la régence.

    Fanny : Donc le mariage permet à ces médecins de financer leurs études et de progresser dans leur carrière ?

    Isabelle : Exactement. Et d’accéder au titre parisien qui permet d’exercer la médecine à Paris. Paris est un marché médical recherché puisqu’on va avoir des populations relativement aisées qui peuvent payer ces services médicaux, et qui peuvent notamment décider d’avoir un abonnement médical, c’est-à-dire d’avoir un médecin à demeure qui va les soigner en fait sur une année. Donc l’abonnement médical est de l’ordre de 200 à 300 livres.

    Fanny : Et juste pour dire aux auditeurs, on avait fait un épisode, donc l’épisode 3, sur les sages-femmes en Alsace au XVIIIè siècle, où on voit qu’effectivement, enfin là c’était un cas particulier, où on voit une professionnalisation du métier de sage-femme, mais parce qu’il y a aussi les hommes qui imposent des études où en fait ils récupèrent un petit peu tout le prestige du côté sages-femmes. Là, on a vraiment pas encore ça dans la médecine générale à Paris, les femmes n’ont vraiment pas du tout de place, même pour rentrer à l’académie ?

    Isabelle : Alors, non. Les femmes effectivement ne sont pas médecin. En revanche, on a des femmes qui exercent la profession de garde-malade. Alors, on ne les trouve pas mentionnées en tant que telles, par contre on trouve la femme garde-malade dans les actes du post-mortem, c’est-à-dire dans les inventaires après décès. Dans les dettes restant à payer, je trouve des frais de garde-malade.

    Fanny : Et c’est précisé que c’est des femmes ?

    Isabelle : Oui, c’est précisé que c’est des femmes. Et j’ai retrouvé un cas de litige dans les papiers des commissaires de police, dans la série Y des archives nationales.

    Fanny : Est-ce qu’il n’y a pas des infirmières ?

    Isabelle : Alors, en fait, ces garde-malades sont quelque part les prémices de la profession d’infirmière, qui va vraiment être institutionnalisée et posée au début du XIXè siècle.

    Fanny : Alors, ces médecins, donc tu en as parlé, ils ont plein de rôles différents, ils enseignent, mais est-ce qu’ils pouvaient aussi avoir un rôle politique, voire même influencer les décisions politiques générales ?

    Isabelle : Alors, effectivement, on peut penser déjà en termes de proximité avec le pouvoir [avec le] Premier médecin du roi, qui est chargé de la personne royale, donc il y a une relation de confiance. D’ailleurs, Lassone va utiliser cette relation pour créer la société royale de médecine. On trouve également des médecins, cette fois-ci, qui vont intervenir dans le cadre de la santé publique, notamment Jean Colombier qui va mettre en place tout le système d’alerte en cas d’épidémie. Il travaille en collaboration notamment avec les services de l’état et avec Necker. La réforme hospitalière, c’est aussi Colombier, en lien avec Necker. Et on les trouve également aux colonies, donc on a des médecins du roi aux colonies.

    Alors, c’est l’une des particularités du sujet, quand j’ai débuté, donc, des médecins parisiens, pour moi c’était Paris. Et je me suis rendue compte que pas du tout. Certains sont médecins des ports donc à Brest, d’autres sont médecins aux colonies. Ensuite, on a cette diversité sociale, tous mes médecins ne sont pas parisiens, ce qui m’a permis aussi de faire un petit tour des archives de France, ce qui était fort agréable, et j’ai découvert différentes sources et différents dépôts d’archives.

    Fanny : Donc, ce qu’on voit en fait c’est qu’au XVIIIè siècle, il n’y a pas forcément des avancées médicales mais qu’on a des avancées de santé générale, d’hygiène, de structuration en fait de tout le corps de santé.

    Isabelle : Exactement. Les avancées sont plus sur la pratique que sur les sciences et la façon de… voilà… les nouveaux traitements.

    Fanny : Est-ce qu’on voit des différences entre la médecine qui est pratiquée à Paris et la médecine qui est pratiquée dans les colonies ?

    Isabelle : Alors, en fait, dans les colonies, les médecins parisiens n’avaient pas de formation particulière. Donc, il faut déjà s’adapter au climat, il faut s’adapter aussi aux besoins locaux. Donc ils avaient tendance plutôt à calquer la façon dont ils auraient pu soigner des individus dans le royaume de France. En revanche, ils rentrent en contact avec les pharmacopées locales, ils les décrivent, mais quant à la mise en œuvre réelle, c’est assez timide. En plus, il y a toute une terminologie qu’ils ne maîtrisent pas. Et ils ont accès à la pharmacopée locale via les ouvrages notamment des missionnaires jésuites.

    Fanny : Est-ce que dans la façon de considérer les populations indigènes – c’est un petit peu anachronique dit comme ça – les populations locales, est-ce que du coup ils se comportent différemment qu’envers les patients parisiens ?

    Isabelle : Alors, dans les colonies, ils ne soignent que les colons européens. Et je pense que tu penses à l’esclavage ?

    Fanny : Notamment, oui.

    Isabelle : Alors les esclaves étaient soignés par le chirurgien de la plantation. Le docteur régent n’ira pas soigner ce genre de population. Par contre, le docteur régent justement, parce qu’il applique cette conception hippocratique et qu’il est sensible à l’environnement de son malade… J’en ai un qui s’appelle Louis Gardanne, qui développe un ouvrage sur la façon de soigner les colons européens, parce qu’ils vivent différemment qu’en France et qu’ils ont un régime alimentaire différent, donc il va falloir adapter la façon de les soigner.

    Fanny : Comment circulaient les savoirs à l’époque ? À part, j’imagine, dans les Académies, est-ce qu’on sait si les médecins pouvaient parler entre eux des différentes avancées ? Est-ce qu’il y avait des échanges d’idées, peut-être directement entre deux personnes ?

    Isabelle : Alors, il y a deux éléments à prendre en compte. Il faut savoir que les médecins peuvent donner des consultations à plusieurs, à la demande du malade. Donc, ils sont plusieurs médecins et ils discutent sur un cas. Ce qui permet d’échanger des points de vue, d’échanger des recettes de remèdes. Donc ça, c’est le cas on va dire pratique.

    [Dans] la deuxième situation, les docteurs régents sont des vulgarisateurs. C’est-à-dire que certains sont patrons de presse, ils développent une presse médicale, donc notamment le journal de médecine, de chirurgie et de pharmacie. Vandermonde, par exemple, est directeur de journal. Il va rester d’ailleurs entre les mains des docteurs régents pendant un certain temps. Gardanne développe également son propre journal, Barbeu du Bourg aussi. Donc, ils reprennent les connaissances qu’ils peuvent acquérir de leurs lectures, parce qu’un des devoirs du docteur régent, c’est de se former constamment, donc il y a tout un pan d’autoformation, il y a un budget quand même dans la dépense d’ouvrages qui n’est pas rien, ils y tiennent.

    Et puis, à la faculté, il y a ce qui s’appelle les assemblées de prima mensis, donc à la demande des doyens, qui rassemblent l’ensemble des docteurs régents et ils discutent sur des cas pratiques. Ils répondent à des demandes parfois d’autres facultés ou d’autres médecins, et certains docteurs régents sont chargés de présenter des ouvrages. Donc c’est le doyen, c’est-à-dire le chef de la faculté, qui est un docteur régent qui a été choisi, qui dirige le corps, et qui charge certains – donc [nomment] des commissaires – de faire ces compte-rendu.

    Fanny : Donc là, le médecin dans la société au XVIIIè siècle a une forte position sociale, c’est vraiment quelqu’un d’important.

    Isabelle : C’est quelqu’un qui en impose, qui – il faut le savoir – ne peut pas faire son autopromotion. Y’a toute une question de la gestion de l’apparence. Donc, il faut habiter dans une maison à porte cochère, tel les nobles, parce que le carrosse passe, et ce carrosse – d’ailleurs La Mettrie le décrit comme ça – c’est une publicité roulante, puisqu’on sait que c’est le carrosse du médecin qui passe, et qui va fréquenter certains quartiers. Or, si on fréquente certains quartiers, on soigne une certaine population. Même chose, certains médecins sont dits « médecins en Cour », c’est-à-dire soignent les patients nobles à Versailles – alors quelques mois, ça se passe par quartiers – et là encore, on peut forger sa clientèle et on s’affiche comme fréquentant les nobles, donc on est membre de la bonne société. D’autre part, certains médecins fréquentent les salons et les loges maçonniques. Faut savoir que c’est un nombre de médecins restreints et, en ce qui concerne les salons, alors on trouve des médecins, mais – pour l’instant j’ai pas de preuve, je continue à chercher sur ce thème-là – je pense que, quand même, leur présence devait être limitée parce que la majorité de leur temps est consacré à la pratique privée de la médecine. Il faut absolument rentabiliser tout cet investissement, dans la location – ils sont locataires – de la demeure, dans l’entretien des chevaux, l’entretien du carrosse…

    Fanny : …De la famille…

    Isabelle : Exactement, donc tout ça coûte… et puis les livres, n’oublions pas les livres, très importants. La pratique privée reste quelque chose de chronophage.

    Fanny : Alors tu as beaucoup parlé des patients nobles, des patients aisés, mais alors, qui soignent les parties un peu plus pauvres ou même plus modestes de la population à Paris ? Est-ce que c’est ces médecins, ou est-ce qu’on a d’autres types de médecins ?

    Isabelle : Alors, les docteurs régents soignent également les populations plus pauvres et, dans ce cas-là, la fonction est institutionnalisée puisque certains sont médecins de paroisse. Et ils apprécient d’être médecins de paroisse parce que ça leur permet d’abord d’explorer Paris. Le médecin de paroisse se déplace chez les populations pauvres, et le médecin de paroisse est en relation directe avec les dames de charité et les sœurs. Donc il se fait reconnaître, ça sert aussi sa réputation : c’est un homme charitable, un homme de bonne mœurs, à qui on peut faire confiance. Et ce qui est intéressant également pour eux, c’est que, lorsqu’on est médecin de paroisse, on est rétribué régulièrement. Les patients, même nobles, ont l’habitude de payer à crédit. Alors, c’est pas spécifique aux docteurs régents, le crédit est une forme de paiement extrêmement importante au XVIIIè siècle, mais enfin, en attendant, y’a un petit retard de trésorerie pour les docteurs. Donc ils sont très contents d’être médecins de paroisse.

    [interlude musical : Music For The Royal Fireworks – La Paix: Largo Alla Siciliana]

    Fanny : D’après tout ce que tu me dis, je vois que tu as beaucoup été dans les archives, tu as fouillé un petit peu partout. Alors, raconte-nous comment est-ce que tu as travaillé sur ces médecins, à partir de quelles sources ?

    Isabelle : Alors, comme je fais de l’histoire sociale, la source principale a été les actes notariés. Donc, les actes notariés, ce sont les contrats de mariage, les inventaires après décès. Ce qui peut paraître paradoxal lorsqu’on parle de médecine, puisque ces documents me renseignent sur la filiation, sur le choix de l’épouse, donc le réseau social, on y revient, et puis tout l’aspect matériel : où vit-on ? qu’a-t-on ? Les bibliothèques. J’étudie en fait les bibliothèques des docteurs régents, qui sont riches d’enseignement, parce qu’on voit, encore une fois, la fidélité à la doctrine hippocratique et en même temps l’intégration de nouveaux ouvrages, le fait que les docteurs régents se lisent entre eux. Donc là, ça répond aussi à ta question précédente.

    Donc ça, c’était un gros travail de retrouver tous ces actes. Et ça a été un vrai bonheur aussi. Je dois avouer qu’ouvrir le carton et trouver l’acte que je cherchais, ça a toujours été très satisfaisant. Donc j’ai travaillé au minutier central. J’ai travaillé également au service historique de Vincennes, puisque j’ai des docteurs régents militaires. Là, je dois dire que j’ai trouvé peu de sources sur ma période. J’ai travaillé à la Bibliothèque interuniversitaire de médecine, et me sont arrivés Les Commentaires. Donc pour les auditeurs, Les Commentaires sont un gigantesque ouvrage, très lourd, avec des renforts métalliques à chaque coin, des gigantesques pages, donc on ouvre ça et, à l’intérieur, alors là… à l’intérieur il y a une partie en latin. Donc, je ne maîtrise pas le latin, et il semblerait que ce soit en plus assez complexe à cette époque puisque c’est du latin médical donc c’est un petit peu du latin de cuisine. [rires] Et en-dessous, il y a quand même une partie en français. Donc, un de mes problèmes a été « mais qu’est-ce qu’ils peuvent bien écrire en latin ? ». Et finalement, en feuilletant les différents volumes de Commentaires, je me suis rendue compte que les textes en latin, c’était plutôt des textes de loi, et les parties qui étaient en français relevaient plutôt de la vie de la corporation. Donc ça m’a permis d’approcher cette vie de la corporation. Et ces Commentaires étaient rédigés par le doyen, donc le chef de la faculté, à la fin de chaque décanat, avec apposition de la signature de tous les docteurs régents à la fin pour approuver ce qui était écrit. En fait, ces Commentaires c’est vraiment la mémoire de la faculté.

    Fanny : Comme une sorte de chronique en fait ?

    Isabelle : Exactement ça. Et puis, les derniers tomes de Commentaires ont été publiés.

    Fanny : Est-ce que tu as travaillé aussi sur des écrits, peut-être, je sais pas… des journaux, mais des journaux tenus par la main de certains médecins ?

    Isabelle : Alors, je n’en ai pas retrouvés. Par contre, j’ai retrouvé leur mention dans les inventaires après décès. Pour un de mes docteurs, qui s’appelle Edme Bourdois de la Motte, sa femme a brûlé son journal dans lequel il y avait le répertoire de tous ses clients.

    Fanny : Pourquoi elle a fait ça ?

    Isabelle : Une crise de folie [rires gênés]. Qu’est-ce que j’ai eu ? J’ai eu quelques témoignages dans les mémoires de femmes nobles qui décrivent leur santé et décrivent quelques relations avec leur médecin. Mais c’est vrai qu’il n’y a pas de pièce véritable…

    Fanny : …Pas de correspondance, de choses comme ça ?

    Isabelle : Alors, il y a les consultations par lettre de Geoffroy qui sont étudiées par Isabelle Robin-Roméro, qui sont conservées à la bibliothèque interuniversitaire de médecine, mais c’est vraiment le pan médical. Alors que moi, je travaille sur, encore une fois, l’aspect social, les relations. Alors par contre, si, ça me fait penser à autre chose. Il y a un fond, qui est un fond privé, auquel j’ai pu avoir accès, par la diligence de la famille, qui est celle du docteur Bourdier, avec des échanges qui expliquent justement que ce docteur Claude Bourdier réussit bien à Paris et grâce à cela il peut prendre en charge sa famille. Donc il va financer les études de médecine de son frère, il va également prendre en charge l’enfant de la domestique, par reconnaissance, et on a comme ça quelques lettres.

    Fanny : Isabelle, dans ta thèse, qu’est-ce que tu as rencontré comme difficultés ?

    Isabelle : D’abord celle de comprendre ce latin, que je n’ai pas compris mais enfin j’ai trouvé moyen de me dépatouiller avec ça. Une autre difficulté a été de me familiariser avec ces différents dépôts d’archives, puisque je n’avais jamais fait, moi, de recherches dans ces centres. Donc chaque dépôt d’archive à son petit mode de fonctionnement, il faut se familiariser avec les séries, se familiariser avec les documents, donc tout un travail de critique externe des documents. Et puis moi, je fais de la prosopographie, c’est-à-dire que je travaille sur un corpus de 453 individus, et j’essaye de renseigner différentes rubriques que j’ai prédéterminées. Donc par exemple : date de naissance, lieu de naissance, cursus… voilà pour les principales. Donc la prosopographie, effectivement, c’est quelque chose de chronophage, il faut y consacrer du temps, mais c’est en cherchant, en fait, que… voilà… et puis on a envie de savoir. Et moi, ma difficulté, ça a été de me dire « bon, bah maintenant ça suffit, on va peut-être arrêter de chercher dans les dépôts d’archives, on va se mettre à tout coordonner et commencer à rédiger ». Et ce qu’il y a, c’est qu’à force de fréquenter ces 453 personnes, on veut tout le temps en savoir plus, on veut tout le temps aller vraiment dans la précision.

    Fanny : Je comprends.

    Isabelle : Mais il faut savoir s’arrêter.

    Fanny : C’était une difficulté pour toi de dire « bon, allez, maintenant je garde ce que j’ai et je passe à la rédaction, et je finis la thèse » ?

    Isabelle : Voilà, exactement. La synthèse, et me dire qu’il y a une suite à cette thèse, et je pourrai reprendre tous ces dossiers qui ont été laissés un petit peu en friche.

    Fanny : Et justement, depuis que tu as fini ta thèse, qu’est-ce que tu fais Isabelle ? Est-ce que tu continues de faire des recherches, ou pas encore ?

    Isabelle : Alors, depuis la fin de cette thèse effectivement, je continue, justement, je reprends ces dossiers en friche, je participe à quelques colloques et journées d’études, et là, j’ai le projet de faire connaître ce travail, donc un projet d’édition qui demande quand même quelques passages…enfin quelques moments de réécriture, de reconsidération, peut-être de synthèse…

    Fanny : Forcément…

    Isabelle : …Parce qu’il y a des points de thèse qui sont extrêmement développés, notamment les notes infrapaginales peut-être à alléger. J’ai également un projet, peut-être, de publier cette fameuse prosopographie, qui pourrait servir à d’autres chercheurs.

    Fanny : Donc publier en fait un ensemble de fiches sur chaque médecin, comme des mini-biographies à chaque fois sur chacun ?

    Isabelle : Oui, peut-être sous la forme d’un dictionnaire qui permettrait peut-être de mieux comprendre, justement, cette bourgeoisie…

    Fanny : …oh, ce serait super intéressant, ça !

    Isabelle : Merci. Ça contribuerait à mieux comprendre ce qu’est la bourgeoisie à talents à Paris.

    Fanny : Pour finir ce podcast, Isabelle, j’ai ma petite question un petit peu rituelle : quels conseils est-ce que tu donnerais à quelqu’un qui voudrait étudier le monde des médecins ou peut-être la société du XVIIIè siècle ?

    Isabelle : Alors, ne pas penser que seules les sources proprement médicales, c’est-à-dire scientifiques, sont sources de connaissance. La médecine a été définie par Jacques Léonard comme étant au carrefour de tout. Effectivement. Puisque la médecine, c’est prendre en compte tout ce qui va influer sur le corps. Mais il y a aussi les relations, il y a aussi la vulgarisation, il y a aussi la législation médicale. Alors, on n’en a pas parlé, mais les docteurs régents vont œuvrer à la mise en place de la médecine légale, ce qui est quand même quelque chose qui n’est pas… comme ça… donné. Il y a la question de l’apparence, il y a la question des enfants, Andry va par exemple développer l’orthopédie. C’est un sujet extrêmement vaste.

    Je conseillerais aussi de ne pas se décourager parce que la recherche en archives, il y a des moments de joie, mais intenses, puis y’a des moments où on est un petit peu au creux de la vague, parce qu’on ne trouve pas, parce que… voilà, ça ne fonctionne pas. C’est pas grave. Il faut toujours aller vraiment de l’avant, se dire que de toute façon, on n’est pas là par hasard non plus, mais il faut développer une certaine ténacité.

    Et puis, encore une fois, peut-être, faire attention à ne pas vouloir tout dire, s’en garder un petit peu pour la suite [rires de Fanny], savoir se dire « bon, maintenant, les archives je vais peut-être arrêter, synthétiser, et après je reprendrai ».

    Fanny : Désormais, chers auditeurs et auditrices, vous en savez un petit peu plus sur la médecine et sur les médecins en France, à Paris, au XVIIIè siècle. Donc, merci beaucoup, Isabelle Coquillard, pour toutes ces informations, tu étais passionnante.

    Isabelle : Merci beaucoup, Fanny Cohen-Moreau, de m’avoir invitée, et de m’avoir posé toutes ces questions, et j’espère que les auditeurs auront découvert un petit peu les médecins parisiens du XVIIIè siècle.

    Fanny : Mais oui ! Et si les auditeurs veulent en savoir plus, on mettra sur le site – alors c’est https://passionmedievistes.fr/passion-modernistes/ – on vous mettra un petit peu plus d’informations. On vous mettra une bibliographie, vous pourrez retrouver plus d’informations pour aller plus loin sur cet épisode. Et si l’histoire moderne vous intéresse, allez voir les autres épisodes de Passion Modernistes. Alors, on l’a dit, il y a l’épisode 3 où on parle des sages-femmes, on avait fait un épisode sur les épidémies, on a fait aussi un épisode sur la fondation de l’État de New York. Voilà, vous avez des sujets assez divers, allez explorer tout ça.

    Retrouvez aussi Passion Modernistes sur Facebook et Twitter. Et dans le prochain épisode, on parlera de Madame Eloffe, marchande de mode de Marie-Antoinette. Salut !

    [Chanson de Francis Cabrel – Docteur]

    Les articles d’Isabelle :

    «  L’émergence des garde-malades dans le marché de la santé à Paris au xviiie siècle », in Recherche en Soins Infirmiers, 139, n°4, 2019, pp. 12-30.

    Portrait du docteur Alphonse Leroy (médecin accoucheur, dans son cabinet de travail, accoudé sur un ouvrage d’Hippocrate), par Jacques-Louis David en 1783. Musée Fabre, Montpellier
    « Nicolas Andry (1658-1742) et l’orthopédie pédiatrique », in e‧sfhm, Supplément illustré de la revue Histoire des Sciences Médicales, vol. 5, n°2, 2019, pp. 22-33.
    «  La cour, un pôle d’attraction et un lieu de concurrence pour les docteurs régents de la faculté de médecine de Paris au xviiie siècle », in Perez Stanis, Vons Jacqueline (éds.), Santé et médecine à la Cour de France (xvie-xviiie siècles), Paris, Bibliothèque Interuniversitaire de Santé, 2018, pp. 27-40.
    « L’apport des actes du post-mortem à la connaissance de la pratique libérale de la médecine, à Paris, au XVIIIe siècle », in Perez Stanis (dir.), Écrire l’histoire de la médecine : temporalités, normes, concepts, nov. 2013, La Plaine-Saint-Denis, France, 2013.
    « Les docteurs régents de la Faculté de médecine de Paris et la fourniture de soins aux « bons pauvres malades » dans les paroisses parisiennes (1644-1791) », in Revue historique, vol. 4, n°668, 2013, pp.  875-904.
    « Des médecins jurés au Châtelet de Paris aux médecins légistes. Genèse d’une professionnalisation (1692-1801) », in Histoire des sciences médicales, vol. 46, n°2, 2012, pp. 133-144.
    « Joseph-François Bourdier de la Moulière et ses travaux sur le quinquina fébrifuge (1809-1811) », in Histoire des sciences médicales, vol. 44, n°2, 2010, pp. 141-152.
    « La longévité médicale du docteur Edme Joachim Bourdois de la Mothe », La Revue, vol. 3, n°6, 2009, pp. 146-170
    « De l’Hôtel des Invalides à la Cour impériale. Itinéraires des Maloet père et fils, docteurs régents de la faculté de médecine de Paris au xviiie siècle », dans Histoire des sciences médicales, vol. 43, n°1, 2008, pp. 39-48.

    Dans cet épisode vous avez pu entendre les extraits des œuvres suivantes :

    Si cet épisode vous a intéressé vous pouvez aussi écouter :

    Ce très beau générique a été réalisé par Julien Baldacchino (des podcasts Stockholm Sardou, Radio Michel, Bulle d’art…) et par Clément Nouguier (du podcast Au Sommaire Ce Soir).

    #12 - Fanny Cohen Moreau : Maroc, mon amour

    #12 - Fanny Cohen Moreau : Maroc, mon amour

    Fanny Cohen Moreau est « un quart marocaine », mais ça ne se voit pas, elle est blanche. Comme elle dit, elle a un corps de Bretonne et un cœur de Marocaine. Un de ses deux noms est juif, par son grand-père marocain, mais elle est athée. Son « chez soi », c’est cette maison où elle a grandi, au Maroc, mais qui va bientôt être vendue.

    Entre les commentaires antisémites, sa marocanité souvent remise en question, le privilège blanc et le sentiment d’imposture, un père « marocain mais qui n’assume pas », le mystère de l’autre grand-père, disparu en mer… on se demande comment elle porte cette histoire complexe. Mais elle y est attachée ! Comme les fantômes soutiennent Harry Potter dans son combat contre Voldemort, toutes ces histoires entremêlées, toute cette lignée compliquée, veillent sur Fanny.

    Ce récit clôt la saison 1 de Joyeux Bazar. En attendant la saison 2 qui débutera en septembre, il y aura deux épisode hors-série au mois d’août. Restez à l’écoute !

    Épisode 5 – Noémie et les mariages à la cour de Louis XIV

    Épisode 5 – Noémie et les mariages à la cour de Louis XIV

    Comment se passaient les mariages à la cour de Louis XIV ? Plongez la tête la première dans les festivités et les archives !

    Passion Modernistes

    Dans cet épisode on vous propose un petit voyage mental à la période faste de la cour de Versailles : imaginez la Galerie des glaces du château de Versailles, les chambres somptueuses, les grands jardins… Et bien sûr Louis XIV, un des rois de France les plus connus à travers le monde.

    Noémie Arnaud
    Noémie Arnaud
    Des mariages à Versailles

    Dans le cadre d’un master 2 Recherche-Agrégation Civilisation des temps modernes à l’université Paris Sorbonne, Noémie Arnaud a réalisé un mémoire sur le sujet “Des mariages à la cour de Versailles : le cas des légitimés, 1692« , sous la direction de Lucien Bély. Elle a étudié les mariages des enfants légitimés de Louis XIV, et plus particulièrement ceux qui se sont déroulés à un mois d’intervalle durant l’année 1692. Il s’agit du mariage du duc de Chartres (le neveu du roi) et de Mlle de Blois II (dernière fille du roi et de Mme de Montespan) qui s’est déroulé les 17 et 18 février, et de l’union du duc du Maine (fils ainé du roi et de Mme de Montespan) et de Louise-Bénédicte de Bourbon-Condé (princesse du sang), qui a eu lieu les 18 et 19 mars.

    Des festivités remarquables

    Dans cet épisode, Noémie Arnaud raconte son travail sur les dispositions légales des mariages, sur le cérémonial, et les à côtés des mariages, comme les festivités et les repas de noce. A la Cour, le mariage est un évènement capital, tant financier que social, politique et mondain. Les mariages de 1692 s’inscrivent dans la politique de promotion sociale que mène Louis XIV à l’égard de ses enfants légitimés, et plus particulièrement de ses filles, tout en étant un prétexte au déploiement de festivités remarquables, montrant les largesses et la magnificence royale. Les mariages en général, dont ceux de 1692, sont également l’une des facettes de la représentation royale, renforçant à la fois la cohésion familiale – à travers des alliances internes au sein de la famille large – et les liens du sang.

    Sur le sujet des bâtards de princes vous pouvez écouter l’épisode de Passion Médiévistes sur le sujet, dans la famille des Bourbon à la fin du Moyen Âge.

    Si vous voulez en savoir plus sur le sujet voici les conseils bibliographiques de Noémie :
    Chapelle royale de Versailles
    Chapelle royale de Versailles © Jean-Marc Manaï

    Sur les mariages :

    • BOLOGNE. J.-C, Histoire du mariage en Occident, Paris, Hachette, 1997.
    • CRESCENZO, R, ROIG-MIRABDA. M, ZAERCHER. V (dir), Les mariages dans l’Europe des XVIème et XVIIème siècles : réalités et représentations, 2 tomes, Nancy, PUN2, 2002.
    • GAUDEMET. J, Le mariage en Occident, Paris, Cerf, 1987.

    Sur la société du Grand siècle :

    • AVIGNON. C (dir), Bâtards et bâtardise dans l’Europe médiévale et moderne, Rennes, PUR, 2016.
    • BELY. L, La société des Princes, XVIème-XVIIIème siècles, Paris, Fayard, 1999.

    Sur les représentations et les fêtes :

    • APOSTOLIDES. JM, Le roi-machine. Spectacle et politique au temps de Louis XIV, Paris, ed. de Minuit, 1981.
    • LEFERME-FALGUIERES. F, Les courtisans. Une société de spectacle sous l’Ancien Régime, Paris, PUF, 2007.
    • MOINE. MC, Les fêtes à la cour du Roi-Soleil, Paris, ed. F. Lanore et F. Sorlot, 1984.
    • QUELLIER. F, Festins, Ripailles et bonne chère au Grand Siècle, Paris, Belin, 2015.
     Dans cet épisode vous pouvez entendre quelques extraits des œuvres suivantes :
    • Cendrillon (1950)
    • Le Roi Soleil – Vice Versailles
    • L’allée du roi (1995)
    • Frank Sinatra – Love and Marriage

    Ce très beau générique a été réalisé par Julien Baldacchino (des podcasts Stockholm Sardou, Radio Michel, Bulle d’art…) et par Clément Nouguier (du podcast Au Sommaire Ce Soir).

    Transcription de l’épisode 5 (cliquez pour dérouler)

    Fanny Cohen Moreau – Bonjour à toutes et à tous, l’Histoire moderne, vous commencez à le savoir, c’est cette période historique coincée entre le moyen âge et l’époque contemporaine. En gros, pour l’Europe occidentale c’est entre 1500 et 1800.

    Dans ce podcast Passion Modernistes je vous propose de rencontrer de jeunes historiens et historiennes qui étudient cette période.

    Episode 5, Noémie et les mariages, c’est parti !

    [Extrait du film On connait la chanson !

    « Il y a des gens que, que ça intéresse »

    « Non personne »]

    Fanny Cohen Moreau – Bonjour Noémie Arnaud.

    Noémie Arnaud – Bonjour Fanny.

    Fanny Cohen Moreau – Tu as fait un mémoire sur les mariages à la cour de Versailles dans le cadre d’un master recherche agrégation sur la civilisation des temps modernes à l’Université Paris Sorbonne et tu étais sous la direction de Lucien Bély. Parfois, on reçoit ici des gens qui ont travaillé sur des dizaines d’années, voire sur des siècles, et toi Noémie tu as travaillé sur une seule année, 1692. Alors, je replace, pour les auditeurs, c’est en fait la période un peu faste de la cour de Versailles. On a tous en tête la galerie des glaces du château de Versailles en France, les chambres somptueuses, les grands jardins et bien sûr Louis XIV, un des rois de France les plus connus à travers le monde. Qu’est-ce qui t’a attirée dans cette période pour que tu veuilles travailler dessus ?

    Noémie Arnaud – Et bien finalement, c’est un petit peu ce que tu as dit, les chambres somptueuses, le faste, le cérémonial de cour, les rois, les reines, les princesses. Alors, c’est un peu trivial et c’est un petit peu enfantin, mais finalement, ce qui m’a attirée en premier dans cette période-là, oui, c’est le côté princes et princesses finalement.

    Fanny Cohen Moreau – Mais est-ce que l’on ne connait pas déjà tout sur cette période ? Enfin j’ai l’impression quand même que ça a été beaucoup beaucoup étudié.

    Noémie Arnaud – Alors oui, c’est vrai que c’est une période qui est extrêmement travaillée. C’est une période qui attire beaucoup les chercheurs. Mais finalement non, on ne connait pas tout. Pourquoi ? Tout simplement parce que l’Histoire est une science qui évolue, donc on arrive toujours à trouver de nouveaux sujets et puis, avec les champs historiques qui évoluent, en fait, qui se développent, on arrive aussi à trouver de nouveaux angles d’attaque, finalement, pour étudier une période qui est déjà travaillée. Alors évidement, tu vas me dire, travailler sur Louis XIV purement et simplement en tant que roi de France, c’est un petit peu bouché à l’heure actuelle. Quand moi j’étais en master, il y avait de l’Histoire politique et diplomatique. Ça, c’est quelque chose, ce n’est pas un nouveau champ, c’est quelque chose qui est assez régulier. Tout ce qui est Histoire du cérémonial de cour aussi, Histoire du genre, Histoire des femmes, Histoire de la famille comme moi, ce que j’ai fait.

    Fanny Cohen Moreau – Alors au sein de ce cadre prestigieux, tu as choisi de travailler sur des mariages, ceux des ducs de Chartres et du Maine. Déjà, qui c’est, le duc de Chartres et qui c’est le duc du Maine ?

    Noémie Arnaud – Alors le duc du Maine, c’est le fils bâtard que Louis XIV a eu avec l’une de ses nombreuses maitresses, Madame de Montespan. Alors, on le sait, Louis XIV a eu énormément de maitresses et Madame de Montespan était maitresse en titre, c’est-à-dire qu’elle était favorite du roi. Et donc, avec Louis XIV, elle a eu 7 enfants dont 4 sont arrivés à l’âge adulte, et le duc du Maine, Louis Auguste de Bourbon est l’un de ces enfants.

    Fanny Cohen Moreau – Et l’autre le duc de Chartres ?

    Noémie Arnaud – Alors, le duc de Chartres, c’est tout simplement le neveu du roi. C’est-à-dire qu’en fait, il est le fils du frère de Louis XIV, donc Philippe d’Orléans, dit Monsieur, et de sa seconde épouse Elisabeth Charlotte, princesse Palatine du Rhin.

    Fanny Cohen Moreau – Et pourquoi tu as voulu t’intéresser à leurs mariages ? Qu’est-ce qu’ils avaient de particuliers pour que tu décides de faire ton mémoire dessus ?

    Noémie Arnaud – Alors, deux particularités principales sur le mariage : la première, c’est que ça concerne deux enfants légitimés du roi. Donc, le duc du Maine a eu 6 frères et sœurs, 4 sont arrivés à l’âge adulte. Ils ont tous été légitimés. Légitimés, c’est-à-dire qu’ils ont été reconnus par lettres patentes enregistrées au parlement de Paris comme étant les seuls enfants du roi. Ça parait un petit peu bizarre mais en fait, comme Madame de Montespan était mariée, il ne fallait pas que le mari de Madame de Montespan puisse réclamer la paternité des enfants de Louis XIV.

    Fanny Cohen Moreau – C’est quand même fou comme histoire.

    Noémie Arnaud – Oui, alors du coup quand on lit les lettres patentes, les lettres de légitimation, parce que ça s’appelle comme ça. Il y a écrit que, en fait, les enfants n’ont pas de mère. Ils n’ont pas de mère, ce sont les seuls enfants de Louis XIV.

    Fanny Cohen Moreau – Est-ce que c’est parce que c’était le roi qu’il pouvait faire ça ou c’était pratiqué à l’époque ?

    Noémie Arnaud – Moi, je me suis concentrée sur ces deux mariages-là, donc je n’ai pas une vision complète en fait. En général, les rois de France s’arrangeaient pour avoir des maitresses – en tout cas ceux à qui il faisait des enfants – non mariées. Donc ça évitait cette problématique. Là, en l’occurrence, elle est mariée, donc il fallu trouver une solution. Ils se sont servis d’un précédent avec Henri IV, je crois. Ce n’est quand même pas très courant. C’est quand même assez original de dire sur lettres patentes enregistrées au parlement de Paris que « bah non, eux ils n’ont pas de mère ».

    Fanny Cohen Moreau – Et à cette époque-là, l’Église ne pouvait pas protester, le pape ne pouvait pas dire des choses, ou ce n’est plus comme au moyen âge du tout, l’Église n’a plus autant de pouvoir ?

    Noémie Arnaud – C’est contesté forcément par l’Église. L’Église elle n’est pas forcément d’accord pour que le roi de France, il ait des maitresses. Maintenant, c’était admis et il le faisait quand même. Et puis, les lettres de légitimation ne dépendaient pas de l’enregistrement par l’Église.

    Fanny Cohen Moreau – Mais le duc de Chartres, ce n’était pas un enfant légitimé. Pourquoi lui, c’était particulier son mariage ?

    Noémie Arnaud – Ah, parce que lui, il a épousé une enfant légitimée. Donc en fait, Louis XIV, il a dit à son neveu « Bah tiens, ma fille ».

    Fanny Cohen Moreau – Et donc sa fille qu’il a eue avec qui ?

    Noémie Arnaud – Madame de Montespan

    Fanny Cohen Moreau – Ces mariages ont eu lieu la même année ?

    Noémie Arnaud – Tout à fait, à un mois d’intervalle en fait.

    Fanny Cohen Moreau – En quoi ces mariages pouvaient être différents de mariages plus classiques d’enfants légitimes ?

    Noémie Arnaud – La principale différence c’est que dans le cadre des mariages d’enfants légitimes du roi qu’il a eu avec la reine, on va en général aller choisir une princesse étrangère pour les questions d’alliances diplomatiques. Là, en l’occurrence ce n’est pas le cas. Pour le duc de Chartres, Louis XIV utilise un prétexte. Donc, ce prétexte, c’est la guerre de la ligue d’Augsbourg en 1686. On est en 1692, donc on est en pleine guerre de la ligue d’Augsbourg où en fait, la France se retrouve un petit peu toute seule contre l’Angleterre, l’Empire, l’Espagne, le Portugal, la Suède, le Danemark.

    Fanny Cohen Moreau – Comme d’habitude.

    Noémie Arnaud – Tout à fait. Et donc, il se sert de ce prétexte-là en disant : « Bah écoute mon neveu, tu es en âge de te marier, par contre, je suis désolé c’est la guerre, donc tiens, ma fille, c’est la seule chose que je peux te proposer si tu veux te marier. Et de toute façon, t’as pas le choix. »

    Fanny Cohen Moreau – Donc ils sont cousins en fait ces enfants.

    Noémie Arnaud – Oui cousins germains. Cousins issus de germains en fait, pour être très techniques.

    Fanny Cohen Moreau – Et pour le duc du Maine ?

    Noémie Arnaud – Lui, c’est un enfant légitimé et c’est un bâtard et c’est un homme. En général les hommes bâtards étaient moins mariés que les filles pour éviter en fait que ça crée des branches parallèles finalement dans la famille royale. C’était moins courant que les garçons légitimés soient mariés, mais en fait le duc du Maine, il avait envie d’être marié. Du coup il est allé demander à son père de se marier. Et donc du coup, avec Madame de Maintenon, parce que Louis XIV était déjà marié avec Madame de Maintenon, qui était la gouvernante du duc du Maine, ils ont discuté et puis ils se sont dit « Bon bah écoute, à la limite il y a les petites princesses de Condé. Bon elles ont un défaut, elles ne sont pas très grandes en taille mais il y a les petites princesses de Condé. » C’est très très important parce qu’en fait, la seule chose qu’a eu à faire le duc du Maine derrière ça, c’est en fait de choisir parmi les 3 filles du prince de Condé. Donc c’est des princesses de sang et son critère de sélection, ça a été la taille.

    Fanny Cohen Moreau – Et là comment tu sais qu’il les a choisies par rapport à la taille ? Dans les archives, c’est mentionné tout ça ?

    Noémie Arnaud – C’est mentionné dans les mémoires, en fait. Dans les lettres, notamment de la Palatine en fait, donc de la mère du duc de Chartres. Parce que La Palatine avait très très peur que le roi décide de marier sa fille au duc du Maine. Elle avait très très peur, alors du coup elle a essayé de trouver des solutions en fait pour que le duc du Maine, il n’épouse pas sa fille. Et une de ces solutions ça a été de dire : « Ah bah à la limite il y a peut-être les princesses de Condé ». Le prince de Condé était très très très très très content que le roi veuille prendre une de ses filles pour belle-fille en fait, donc du coup il lui a dit « bah écoute, tiens, choisi ».

    [Extrait du dessin animé Cendrillon de Disney

    Le Roi – L’important est qu’un jeune homme rencontre une jeune fille dans des conditions favorables. Alors à nous de faire en sorte qu’elles le soient mon cher duc.

    Le grand-duc – Mais, mais votre majesté, si jamais le prince se doute…

    Le roi – Mais qu’est-ce que vous me chantez là ? Allons, le prince rentre de voyage aujourd’hui n’est-ce pas ?

    Le grand-duc – Heu ouououi sire.

    Le roi – Et bien, qui a-t-il de plus naturel qu’un grand bal pour fêter son retour ?

    Le grand-duc – Heuu rien sire.

    Le roi – Et si par hasard toutes les filles à marier de mon royaume étaient [rire] conviées à ce bal, pourquoi ne tomberait-il pas amoureux de l’une d’entre elle je vous le demande ?]

    Fanny Cohen Moreau – Et dans ton mémoire, qu’est-ce que tu as étudié précisément sur ces mariages ?

    Noémie Arnaud – J’ai étudié différents éléments. D’abord, tout ce qui était dispositions légales autour du mariage, donc j’ai travaillé beaucoup, j’ai fait tout un chapitre sur les contrats de mariages et les dispositions légales. J’ai travaillé sur le cérémonial pur, donc sur le déroulement des deux mariages : les points communs, les différences, qui était là, qui n’était pas là. Et tout ce qui allait à côté du mariage, donc tout ce qui est festivités, repas de noces finalement, perception du mariage aussi à la cour, à l’étranger et dans l’opinion publique, parce que l’on sait maintenant qu’il y avait un début d’opinion publique à la fin du XVIIème siècle, et également j’ai travaillé sur les tenues vestimentaires des mariages.

    Fanny Cohen Moreau – Alors raconte-nous comment se sont passés ces mariages. Il y a eu un souci, des problèmes de robes ou alors non vraiment tout s’est très bien passé ?

    Noémie Arnaud – Alors, des problèmes de robes, non. Par contre, il y a eu des petits problèmes de cérémonial, il y en a toujours. C’est le maitre de cérémonie de l’année 1692, en fait, Desgranges, qui nous raconte ça dans ses relations de cérémonies. Et donc, il nous explique par exemple que pour la messe du mariage du duc de Chartres, il y a eu un problème de carreau. Donc le carreau, c’est le grand coussin qui était posé sur les marches de l’autel pour que les mariés viennent s’agenouiller pour être bénis. Et bah là, il y a eu un problème, il manquait un carreau, donc du coup il a fallu en amener un autre en urgence. Il était trop grand, il ne tenait pas sur la marche. Enfin voilà.

    [Rires]

    Fanny Cohen Moreau – Le problème existentiel quoi !

    Noémie Arnaud – Tout à fait ! Mais sinon, dans l’ensemble, il n’y a pas eu de gros gros soucis. On sent juste en fait que pour le mariage du duc de Chartres, le roi a mis un petit cran au-dessus par rapport au mariage du duc du Maine au niveau cérémonial, donc tout ce qui est longueur des processions, dispositions légales finalement. Le montant de la dot de la duchesse de Chartres est absolument faramineux. Et par exemple, pour les processions, là, c’était les gardes qui étaient en tenues de cérémonie alors que pour le mariage du duc du Maine, ils étaient en habit normal. Donc c’est des petits éléments comme ça. Pour le duc du Maine, en plus, les processions ont été raccourcies. Pour la simple et bonne raison que le duc du Maine étant boiteux, pour lui, les grandes distances c’est un petit peu compliqué.

    Fanny Cohen Moreau – Quelles étaient alors à l’époque les étapes d’un mariage ? Les grandes étapes incontournables d’un mariage ?

    Noémie Arnaud – La première étape, d’abord, c’est la publication des bans. Alors en fait, ça servait à informer le fait qu’il y allait avoir un mariage et donc éviter les mariages clandestins. Dans le cadre du mariage du duc de Chartres, ce qui n’est pas le cas pour le mariage du duc du Maine, il y a eu nécessité de demander une dispense pontificale, pour la simple et bonne raison qu’ils étaient cousins issus de germains. Alors normalement, les cousins issus de germain n’ont pas le droit de se marier, mais comme là, ils allaient se marier, le roi est allé demander au pape une dispense, donc en fait ça cassait la règle de l’Eglise et donc comme ça, ils ont pu se marier.

    Fanny Cohen Moreau – Le pape a accordé la dispense tranquille…

    Noémie Arnaud – Il n’avait pas trop le choix, je pense. Pareil, ça fait partie de tout un… c’est des secrétaires d’état qui envoient un envoyé à Rome, et puis il faut qu’il revienne, enfin voilà, donc c’est encore toute une histoire mais ils l’ont eu, la dispense.

    Le mariage du duc de Chartres, il a eu lieu le 17 et le 18 février 1692, et le mariage du duc du Maine a eu lieu les 18 et 19 mars de la même année. Donc le mariage on peut le voir, se coupe en 2 jours. Le premier jour, ce sont les fiançailles. Donc les fiançailles, finalement, c’est l’occasion à la fois de lire le contrat de mariage, à la fois de le signer, toujours selon la hiérarchie de la famille royale. Bien sûr, le roi en premier et après les fils de France, les petits-fils de France, les princes du sang etc. Voilà, ils ont lu le contrat, ils l’ont signé et ensuite c’est l’échange des cadeaux. Tu auras le roi qui dit qu’il va offrir à sa fille pour tant de livres de bijoux. Oui, elle a eu beaucoup de bijoux, la duchesse de Chartres. Beaucoup, beaucoup de bijoux. Un certain nombre de meubles, enfin le trousseau finalement. Et donc une fois qu’il y a les cadeaux en fait, c’est fini, ils sont bénis par l’officiant.

    Fanny Cohen Moreau – Ils sont fiancés.

    Noémie Arnaud – Voilà ils sont bénis, et puis ça y est, c’est bon, ils sont fiancés. Après le repas qui suit les fiançailles, finalement, le roi a offert un bal pour les fiançailles du duc de Chartres. Et pour les fiançailles du duc du Maine, il a offert un divertissement et une collation à Trianon, un petit peu comme les soirées d’appartement. Sachant que Trianon, c’est un petit château qui s’est fait construire pas très loin du grand château de Versailles.

    Fanny Cohen Moreau – Donc on fait la fête le soir des fiançailles et le lendemain donc, il y a le mariage.

    Noémie Arnaud – Tout à fait. Donc le mariage suit immédiatement le conseil du roi. Ça se passe avant la messe du roi. Il sort du conseil vers 11h à peu près, donc finalement avant de déjeuner, quoi. On expédie les affaires du royaume, on marie sa fille et ensuite on va aller manger. Le mariage, il a eu lieu dans la chapelle du château. Ça consiste en une suite de rituels et de prières et de bénédictions. Ils sont déclarés mariés après l’échange des consentements et vérifications des autorisations parentales, multiples révérences également. Après, il y a la messe, après, il y a encore d’autres rituels, bénédictions, encore, le duc de Chartres et le duc du Maine donnent un anneau d’or, qui est béni, à la mariée. On a encore d’autres rituels entres les mariés et l’officiant, donc c’est des rituels d’offrandes, il y a encore des bénédictions, et puis après c’est fini. Et une fois que tout ça c’est fait, on va manger.

    Fanny Cohen Moreau – C’est vraiment important le repas. Que ce soit pour les fiançailles ou pour le mariage, c’est indispensable.

    Noémie Arnaud – Ça suivait le fil de la journée finalement. Pour les fiançailles, on était après 18h, le temps que ça se fasse, que tout le monde signe et tout, qu’il donne les cadeaux, qu’il explique qu’est-ce qu’il avait donné en cadeau. Et puis après, il fallait manger parce que de toute façon, c’était l’heure, et du coup les divertissements suivent en fait le repas

    Fanny Cohen Moreau – Est-ce qu’il y a eu des choses particulières pendant ces mariages, en termes de divertissements ou d’événements ?

    Noémie Arnaud – Réellement, la particularité de ces deux mariages, c’est vraiment les divertissements qui suivent les fiançailles. C’est le bal pour les fiançailles du duc de Chartres et le divertissement à Trianon pour le duc du Maine. Pour le mariage du duc de Chartres, il y a également un bal le lendemain du mariage, mais seulement le lendemain du mariage. Parce qu’en fait, il fallait que l’union soit consommée. Donc, c’était une fois que le souper a eu lieu, donc le soir, toute la cour qui se promène jusqu’à la chambre nuptiale pour voir l’officiant bénir le lit. Ensuite, le roi fait sortir tout le monde et puis consommation du mariage.

    Fanny Cohen Moreau – Mais le roi, il ne reste pas, on est d’accord ?

    Noémie Arnaud – Non non, il ne reste pas, dans ce cas-là.

    Fanny Cohen Moreau – Mais il y a déjà des fois où les gens sont restés pendant la consommation ?

    Noémie Arnaud – Quand j’ai travaillé pour un exposé sur le mariage de Catherine de Médicis avec le futur Henri II, l’envoyé pontifical et le père d’Henri II, donc François Ier, ils sont restés.

    Fanny Cohen Moreau – Ils sont restés les regarder avoir leur première relation.

    Noémie Arnaud – Oui.

    Fanny Cohen Moreau – OK.

    Noémie Arnaud – Pour être sûrs que ça ait bien lieu. Parce qu’en fait, l’envoyé pontifical, il voulait être sûr qu’après, Catherine ne soit pas répudiée. C’était une garantie, cette consommation en fait. Le fait que le mariage ait été consommé, la consommation charnelle faisait qu’ils étaient mariés.

    Fanny Cohen Moreau – Ok, donc là, quelques années plus tard, sous Louis XIV, on n’est pas à ce point-là. De toute façon, là, on n’a pas peur que la mariée soit répudiée à ce niveau-là.

    Noémie Arnaud – Non, là, pas du tout. Et puis de toute façon, c’est le mariage de sa fille, donc le duc de Chartres a plutôt intérêt à consommer, si tu veux mon avis.

    [Musique « Et vice Versailles » par Le roi soleil]

    Fanny Cohen Moreau – Comment se sont passées tes recherches pour travailler sur ces mariages ? Qu’est-ce que tu as fait et est-ce que tu as pu être en contact direct avec des manuscrits ?

    Noémie Arnaud – Oui, oui, oui, j’ai été en contact direct avec les manuscrits. En fait, j’ai commencé par faire un point bibliographique pour savoir ce qui avait été fait, ce qui n’avait pas été fait, ce qui avait été trouvé aussi, ce qui ne l’avait pas été. Parce qu’en master d’Histoire moderne et pareil en thèse d’ailleurs, d’autant plus en thèse, on a comme condition imposée de trouver des documents inédits. C’est-à-dire des documents qui n’ont jamais été trouvés par quelqu’un et donc d’où ce soient nos bébés à nous.

    Fanny Cohen Moreau – Comment tu trouves un document qui n’a jamais été trouvé, je ne comprends pas vraiment ?

    Noémie Arnaud – Alors, avec un sujet qui n’a pas été forcément travaillé, tu arrives à trouver des documents qui n’ont pas été forcément travaillés ou en tout cas, pas travaillés sous l’angle sous lequel tu l’as fait.

    Fanny Cohen Moreau – Donc ce n’est pas des documents que tu es allée trouver dans des archives ou dans des fonds privés où ça n’a jamais été mis au grand public quoi ?

    Noémie Arnaud – En fait, le fait d’avoir un document inédit, c’est en fait un document qui n’a pas été encore publié. Et donc, pour un master d’Histoire moderne, on a comme condition imposée, en fait, d’avoir des documents qui n’ont jamais été travaillés par quelqu’un, qui n’ont jamais été publiés, donc un document inédit. Et donc, pour réussir à savoir si un document est inédit ou pas, il faut d’abord faire le point sur l’aide bibliographique, ce qui a été trouvé ou pas. Un fois que ça c’est fait, on épluche, enfin moi en tout cas, j’ai épluché les catalogues d’archives, donc j’ai été aux archives nationales, j’ai été à la BNF, je suis allée aux archives diplomatiques, je suis allée dans beaucoup d’endroits, je suis allée à la bibliothèque Mazarine aussi, donc les archives constituées notamment par Mazarin. Et je suis allée aussi au château de Chantilly, parce que le château de Chantilly, en fait, c’est le château des princes de Condé. Après, on épluche les fonds et effectivement, dans plusieurs cas, j’ai eu vraiment le manuscrit en lui-même dans les mains. On m’a donné un lutrin ou on me l’a posé dessus.

    Fanny Cohen Moreau – Mais ton directeur de mémoire, quand il t’a donné ce sujet, il savait que ça n’avait jamais été étudié, il s’est dit : « bah attend, là on a un pan de l’histoire qui n’est pas étudié, vas-y Noémie, fonce » ?

    Noémie Arnaud – Ce qui s’est passé, c’est que j’ai pas mal discuté avec lui en rendez-vous pré-master et on a déterminé un petit peu mes points d’intérêts pour connaitre un petit peu sur quoi j’aimais travailler, sur quoi j’aimerais travailler aussi, et au fur et à mesure, on a défini un sujet. Bon à l’époque, il était beaucoup trop large, je devais travailler sur les mariages de la famille royale sous Louis XIV, et c’était bien trop large. Donc du coup, on a restreint en fait à ces mariages de 1692, qui ont du coup la particularité déjà évoquée d’être des mariages de bâtards et en plus, d’être des mariages hypergamiques.

    Fanny Cohen Moreau – D’ailleurs j’en profite juste pour dire, les auditeurs, si le sujet des bâtards vous intéresse, dans l’autre podcast Passion Médiévistes, nous avions fait un épisode spécial sur des bâtards de princes au Moyen Âge, si vous voulez en savoir plus sur comment ont été élevés les bâtards, comment étaient considérés les bâtards dans une famille de prince. Et donc, dans ton travail d’archive, tu as découvert des sources inédites.

    Noémie Arnaud – Alors j’ai principalement trouvé les quittances de dot de la duchesse du Maine. Donc dans les registres comptables de son père, j’ai trouvé à chaque fois la somme qu’il a versé au duc du Maine pour la dot de sa fille. J’ai trouvé des plans de table, j’ai trouvé des plans de la chapelle et puis les relations de mariage. Bon après, les relations de mariage avaient déjà été en partie publiées pour une des deux versions par Alexandre Maral.

    Fanny Cohen Moreau – Qu’est ce qui t’a le plus surpris dans ton travail ?

    Noémie Arnaud – Je ne sais pas si quelque chose m’a surpris en particulier, parce qu’à partir du moment où t’as fait le travail bibliographique, que t’as fait le travail d’archives que tu sais sur quoi tu pars finalement, c’est plus vraiment quelque chose de surprenant. Enfin moi, en tout cas, je savais où j’allais une fois que j’avais fait tout ce travail-là. Par contre, le plus frustrant en fait, dans la recherche, c’est d’abord de pas forcément trouver le document qu’on veut. Par exemple, j’ai cherché pendant deux ans… bon je n’ai pas trouvé hein, si d’ailleurs quelqu’un sait où c’est… J’ai pas trouvé de représentation iconographique de ces deux mariages. Je ne les ai pas trouvées.

    Fanny Cohen Moreau – Mais tu sais qu’elles existent ?

    Noémie Arnaud – Bah justement, je ne sais pas. Je ne les ai pas trouvées.

    Fanny Cohen Moreau – Mais d’habitude ça existe, c’est pour ça que tu penses qu’il y en a ?

    Noémie Arnaud – Alors je me suis dit qu’il y en avait, parce qu’il y en avait eu pour le mariage d’une autre fille légitimée de Louis XIV. Donc je me suis dit « bon, si il y a pour ce mariage-là, il doit y avoir pour les miens. En plus, là, c’est quand même le frère du roi, enfin le fils du frère du roi ». Et bah, j’ai pas trouvé, donc c’est extrêmement frustrant en fait de ce dire « si ça se trouve ça existe mais j’ai pas trouvé ». Bon il y a deux solutions, soit ça existait vraiment et ça a été perdu, détruit et on en a plus trace, soit ça a pas été fait du tout.

    Fanny Cohen Moreau – Tu a évoqué le terme hypergamique, ça veut dire quoi ?

    Noémie Arnaud – Un mariage hypergamique, c’est un mariage où l’un des deux conjoints a un rang inférieur à l’autre. Donc c’est exactement là ce qui se passe, dans les deux cas d’ailleurs. Le duc de Chartres est fils du frère du roi. Il épouse une bâtarde qui est forcément inférieure en rang à lui. Et dans le cas du duc du Maine, il épouse une princesse du sang qui est en fait aussi plus élevée en rang que lui. Et donc le duc du Maine, il va, toute sa vie, il va se faire un petit peu humilier par sa femme et elle insiste en fait même dans le contrat de mariage et les négociations pour que le fait qu’elle soit plus élevée en rang que lui soit bien marqué. Elle passait systématiquement devant lui, enfin voilà.

    Fanny Cohen Moreau – Ils avaient quel âge tous ces gens au moment de leurs mariage ?

    Noémie Arnaud – Pour les garçons entre 18 et 20 ans à peu près, et pour les filles c’est un petit peu plus jeune, donc la duchesse du Maine est mariée à 17 ans et il me semble que pour la fille légitimée de Louix XIV, c’est à peu près pareil, 14, 15, 16 ans.

    Fanny Cohen Moreau – Au niveau de l’âge, est-ce que c’est représentatif de l’âge auquel se mariaient les gens à cette époque-là ?

    Noémie Arnaud – Alors représentatif de l’âge auquel se mariaient les gens dans la bonne société ou dans le peuple ?

    Fanny Cohen Moreau – Oui dans la bonne société.

    Noémie Arnaud – Dans la bonne société, relativement, oui. Il y même souvent des cas où, en tout cas dans les mariages diplomatiques, les négociations diplomatiques entre familles régnantes, les enfants sont fiancés à 3, 4, 5 ans.

    Fanny Cohen Moreau – Finalement des mariages à la cours de Versailles, comme ça, ou des mariages d’enfants de Louis XIV, légitimés ou non, ça arrivait souvent ?

    Noémie Arnaud – Pas tant que ça en fait. Sous Louis XIV, après son propre mariage à lui en 1660 avec Marie-Thérèse, il y a eu le mariage, les deux mariages de son frère, donc celui avec Henriette d’Angleterre et la Palatine. Il y a eu le mariage de son fils le Dauphin, le mariage du duc de Chartres, le mariage du duc du Maine, celui de la première fille légitimée, qu’il a légitimée avec une autre de ses favorites. Ensuite, on enchaine sur les mariages de ses petit-enfants, en fait. Donc, des mariages au sein de la famille royale finalement, il n’y en avait pas tant que ça. Ce qui s’explique principalement par le fait que le roi, il a perdu 5 de ses 6 enfants légitimes. Donc Marie-Thérèse, elle a eu 6 enfants avec Louis XIV, elle en a perdu 5. Et à côté de ça, elle voyait la Montespan enchainer les grossesses et ses enfants, ils vivaient.

    [Extrait du film La vie du Roi

    Françoise d’Aubigné : Je crois que Madame de Montespan n’a plus besoin de moi pour ce soir. Puis-je demander à votre majesté la permission de me retirer ?

    Louis XIV : Je vous sais un gré infini pour toutes les choses que vous faites pour mon service, Madame de Maintenon.

    Voix de Madame de Maintenon : Il m’avait nommée Madame de Maintenon. Jamais, en si peu de mots, offrait-on une revanche plus éclatante à une femme humiliée. D’un trait il avait supprimé ce pauvre Scarron et ce passé misérable qui collait à ma peau.]

    Fanny Cohen Moreau – On vient d’entendre un extrait du film La vie du roi, où on voit une représentation du mariage entre Louis XIV et l’une de ses favorites, Madame de Maintenon. Tu penses quoi de cette représentation, c’est un peu fidèle à ce qu’il y avait à l’époque ?

    Noémie Arnaud – Alors, la particularité du mariage de Louis XIV avec Maintenon, c’est que c’est un mariage sans témoin et que c’est un mariage de nuit. En fait, on ne sait même pas vraiment si le mariage a vraiment eu lieu. On se doute que, mais on n’a pas de source d’archive qui prouve qu’ils sont bien mariés. La deuxième chose, c’est après sur le fond, effectivement, oui c’est exactement ça. Il y a bien l’officiant, il y a bien la bénédiction, la messe. Il y a effectivement l’anneau qui est passé au doigt de l’épouse et effectivement, il y a les carreaux où ils sont sur les marches de l’autel. La seule particularité dans ce cas-là, c’est que comme il n’y a pas de témoin, il n’y a pas toute la cour derrière en fait. A priori, oui c’est relativement cohérent.

    Fanny Cohen Moreau – Tu as rendu ton mémoire maintenant il y a quelques mois. Qu’est-ce que tu fais depuis, il me semble que tu prépares l’agrégation et le capes, c’est ça ?

    Noémie Arnaud – Tout à fait, j’ai soutenu donc, en juin 2017, et depuis, je me suis lancée dans la préparation des concours de l’enseignement, donc le capes et l’agrégation d’histoire. J’ai raté à quelques points près le capes l’année dernière, donc je suis repartie pour une seconde année.

    Fanny Cohen Moreau – Et je sais que c’est difficile.

    Noémie Arnaud – Oui.

    Fanny Cohen Moreau – Est-ce que tu veux nous parler un petit peu de ce que c’est de faire ça, parce que vraiment enfin, les auditeurs, peut-être vous savez, mais c’est vraiment quelque chose d’assez dur et je vois sur Twitter, tu en parles souvent. Ça vous met dans des états vraiment très très difficiles de tension, de stress.

    Noémie Arnaud – Oui oui, c’est quelque chose qui est physiquement, psychologiquement, intellectuellement, qui est extrêmement compliqué à vivre surtout comme dans mon cas, où on repart pour une seconde année en ayant raté à quelques points près une admission. Il faut réussir à se remotiver, il faut repartir, ça demande une masse de travail assez considérable, tout le monde le dira, tout le monde le confirmera. Ça demande une masse de connaissances à emmagasiner assez phénoménale. D’ailleurs, en fait, c’est pas possible de tout savoir. Il faudrait tout savoir mais ce n’est pas possible. Ça demande aussi de jouer avec deux disciplines, donc l’histoire et la géographie, parce que même pour l’agrégation d’histoire, on a une épreuve de géographie. Ça demande vraiment énormément de travail, de connaissances. Si vous voulez vous lancer là-dedans, il faut vraiment avoir envie de le faire parce que quand on y est, on a plus envie d’y être.

    Fanny Cohen Moreau – Et est-ce que tu aimerais aussi poursuivre la recherche en Histoire, peut-être faire une thèse ?

    Noémie Arnaud – Oui ! On sent l’enthousiasme et la frustration quand je dis ça. Oui, oui, re-oui. Oui, la recherche me manque. Moi, ça fait deux ans du coup que j’ai arrêté ça. C’est nul, quoi, bachoter un manuel sur un truc qui m’intéresse pas forcément, c’est nul. Je veux retourner faire de la recherche. Je veux aller faire une thèse, je veux… voilà !

    Fanny Cohen Moreau – Est-ce que tu aurais une idée de sujet pour la thèse ?

    Noémie Arnaud – Des idées oui, précises non.

    Fanny Cohen Moreau – Toujours j’imagine sur le contexte de Versailles et tout ça ?

    Noémie Arnaud – Ça, je ne sais pas encore, je pense que je vais rester sur cette thématique du mariage. Après à voir, ça c’est encore à discuter de façon très précise avec un directeur de recherche.

    Fanny Cohen Moreau – Pour finir Noémie, est-ce que tu aurais des conseils, ou en tout cas un conseil, à donner pour les personnes qui aimeraient se lancer dans les études d’Histoire moderne ?

    Noémie Arnaud – Ce que je vais dire, je pense que ça a été déjà dit plusieurs fois dans Passion Médiévistes. Je pense que ça a été déjà dit aussi dans Passion Modernistes. Ça sera redit dans Passion Modernistes et Passion Médiévistes mais le plus important, quand on fait de l’Histoire moderne, c’est d’aimer son sujet. C’est de choisir quelque chose en rapport avec ce qui vous intéresse, parce que vous allez être finalement presque en couple avec ce sujet, soit en couple, soit c’est votre enfant, enfin ça dépend un petit peu. Mais vous allez vivre avec ce sujet un moment et il ne faut surtout pas que ça vous dégoute, en fait. Donc c’est vraiment choisir quelque chose qui vous intéresse, de travailler avec quelqu’un, donc un directeur de recherches ou une directrice de recherches en qui vous avez confiance, avec qui ça se passe bien, avec qui vous vous entendez bien. Et puis, l’histoire moderne, ça a un avantage par rapport à l’histoire antique c’est qu’on n’a pas besoin de maitriser les langues anciennes, donc tout ce qui est grec, latin ou même égyptien ancien, ça c’est, voilà. Je sais qu’en histoire antique et en histoire médiévale, maitriser, en tout cas pour l’histoire médiévale, l’allemand et au moins le latin, et en histoire ancienne d’autant plus, c’est quand même un prérequis quasiment systématique. Et là, ce n’est pas le cas, donc l’histoire moderne c’est bien.

    [Musique]

    Fanny Cohen Moreau – Maintenant chers auditeurs vous en savez un petit peu plus sur comment se passait un mariage à la cour de Louis XIV, donc merci beaucoup Noémie Arnaud et bon courage pour la suite.

    Noémie Arnaud – Merci.

    Fanny Cohen Moreau – Pour en savoir plus, vous pouvez retrouver, pour vous les auditeurs à qui je vous parle là maintenant, vous pouvez retrouver dans la description de cet épisode plus d’informations, donc Noémie vous mettra des petits conseils de titres de livres à retrouver. Et tout ça, c’est à retrouver sur le site passionmedievistes.fr. Si vous voulez soutenir Passion Modernistes et un petit peu Passion Médiévistes, vous pouvez contribuer à notre Tipeee. C’est une campagne de financement participatif, donc vous pouvez donner un ou deux euros ou comme vous voulez. Et donc pour retrouver les actualités de ce podcast, savoir peut-être quels seront les prochains sujets, allez sur Twiter ou sur Facebook. Et à dans un mois pour un nouvel épisode. Salut !

    [Musique – Frank Sinatra – Love and Marriage]

    Merci à Amélie pour la transcription et à Liz pour la relecture !

     

    S01E09 : Musique !

    S01E09 : Musique !

    Au programme de cet épisode enregistré au Petit Garage (Paris 11e), musique ! Et que chacun se mette à chanter ! On a parlé, entre autres : iPod, musique mnémonique, chansons pour enfants, concerts mémorables…

    Merci à Fanny du podcast Passion Médiévistes qui parle d’histoire mediévale en interviewant des étudiants sur des sujets hyper intéressants comme la mode et les dragons,
    et merci à Alex, Jay et Nico du Potescast, où ils critiquent un album français chanson par chanson avec la mauvaise foi nécessaire à l’exercice !
    Écoutez-les !

    Deux fois plus de plaisir pour tes oreilles grâce à cet épisode, puisqu’on a fait une playlist de (presque) tous les artistes cités !
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    Si vous êtes à la recherche de bons rades où traîner, on met à dispo notre carte de rades approuvés (à Paris seulement pour le moment, mais on va bientôt quadriller la France !) sur Google maps et Mapstr (Identifiant : dtrpodcast38)

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